Samedi 29 mai – Jeudi 3 juin 1948.
159> Le Doux Hôte dit :
La Loi est spirituelle. Elle demeure telle
même lorsqu'elle interdit des choses matérielles.
Dans le Décalogue, à vrai dire, les préceptes purement spirituels sont les
trois premiers. Les sept autres, et surtout les six derniers,
interdisent des actes qui sont susceptibles de nuire à votre prochain, à sa
vie, à sa propriété, à ses droits, à son honneur. On pourrait alors objecter
que la Loi est "spirituelle", oui, parce qu'elle vient de Dieu,
mais que cela n'est pas tout à fait juste, du moment qu'elle interdit, pour
au moins les deux tiers, des actes matériels que Dieu désapprouve.
Alors il faut comprendre qu'au-dessus des dix Commandements de la Loi
parfaite, il y a la perfection de la
Loi, elle-même, avec les deux commandements donnés par le Verbe
enseignant : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu avec tout ton cœur, toute ton
âme et tout ton esprit. Voilà le plus grand commandement, le premier entre
tous. Le deuxième est semblable au premier : Tu aimeras ton prochain comme
toi-même. Toute la Loi, ainsi que
les prophètes, dépend de ces deux
commandements".
À la lumière de la Lumière qui est le Verbe, s'illumine la spiritualité
contenue dans la Loi, donnée pour faire vivre dans l'amour. Parce que toute
la Loi est fondée sur l'amour et vit pour l'amour. Or, l'amour est chose
spirituelle, quelles que soient les créatures ou l'Etre vers lesquels il se
tourne.
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160> Triple amour de Dieu: amour du
cœur, de l'âme, de l'intellect. En effet, dans l'homme se retrouve une petite
trinité: la matière (cœur), l'âme (esprit), l'intelligence (raison). Il est
juste que ces trois choses que Dieu a créées pour former une créature unique
— l'homme — témoignent à Dieu leur reconnaissance pour l'existence qu'elles
ont reçue de lui.
Amour triple, donc : amour du cœur, de
l'âme, de l'intelligence. Adam a péché avec son cœur (concupiscence de la
chair), avec son âme (concupiscence de l'esprit) et avec sa tête
(concupiscence de la raison). Ainsi il est sorti de l'ordre. Il a abusé des
dons reçus de Dieu. Il a offensé Dieu avec les mêmes dons que Dieu lui avait
accordés pour que l'homme puisse lui ressembler et le glorifier.
C'est avec les choses qui ont péché qu'il faut réparer le péché, effacer
l'offense, rétablir l'ordre violé.
Pour faire cela et vous redonner "grâce et vérité", et en mesure
pleine, débordante, inépuisable, le
Verbe s'est fait chair.
Par cela même que le premier homme a péché, l'Homme-Dieu répare. Il vous
enseigne par son exemple encore plus que par sa doctrine. Bien que cette
dernière soit parfaite, vous pourriez juger impossible sa pratique. Il est
Maître par ses paroles, mais aussi par son exemple. Tout ce qu'il a fait,
vous aussi pouvez le faire.
En chaque homme persiste l'héritage d'Adam comme si Adam s'y cachait. À
l'instar du premier Adam chaque homme dans l'épreuve peut se révéler faible.
Mais le Christ est venu afin que vos chutes soient réparées, et vos plaies
guéries; afin que la Grâce vivifiante soit rétablie en vous lorsque, dans les
épreuves de tous les jours, votre faiblesse vous fait tomber dans la mort
spirituelle d'où le Baptême vous avait sortis. Jésus-Christ est venu pour
être pour vous Maître et Modèle, et pour que vous soyez pour lui des
disciples et des frères, non seulement de nom et d'appartenance, mais aussi en
esprit et en vérité, en l'imitant dans la perfection du triple amour que
lui-même a eu pour le Père.
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161> Par ce triple amour, Jésus a été fidèle à la justice de la chair, tout en restant libre d'accepter ou de refuser les
tentations comme n'importe quelle autre personne.
Par ce triple amour, Jésus fut parfait dans la justice de l'âme, c'est-à-dire dans l'obéissance à l'ancien
précepte divin: "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu". En effet, il ne
s'est pas jugé exempté de ce devoir en raison du fait qu'il était Dieu comme
son Géniteur Eternel, ni parce qu'il était Homme-Dieu, vrai Homme et vrai
Dieu grâce à l'union hypostatique des deux Natures (il ne l'était pas par une infusion
temporaire de l'Esprit de Dieu dans une chair choisie à ce dessein, ni par
l'union morale d'un homme juste avec son Dieu). L'union hypostatique, elle a
eu lieu sans que la nature divine soit modifiée par son contact avec la
nature humaine, et sans que la nature humaine — composée de chair, de raison
et d'esprit — ait été altérée par cette union avec la nature divine.
Enfin, par ce triple amour, Jésus a été sublime dans la justice de son intelligence car il a soumis sa parfaite
intelligence non seulement à la Loi divine — comme tout homme doit le faire
lorsque cette Loi lui est dévoilée — mais aussi aux projets que le Père avait
sur lui et par lui. En tant qu'Homme, il a accepté chaque chose proposée par
le Père, il a accompli tous ses devoirs d'obéissance, jusqu'au dernier: la
mort sur la croix.
"Devenu serviteur" en faveur de l'Humanité déchue, Jésus a dépassé la
limite qu'il avait lui-même placée pour indiquer aux hommes le chemin de
l'amour parfait. Il n'a pas imposé aux hommes le sacrifice total comme terme
d'amour obligatoire pour posséder le Ciel. Dans son deuxième commandement
d'amour, il vous demande d'aimer votre prochain seulement "comme vous-mêmes".
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162> Quant à lui, il est allé au-delà de
ce précepte. Il ne s'est pas contenté d'aimer son prochain comme il s'aimait
lui-même. Il l'a aimé bien davantage car pour faire du "bien" à son prochain il a
sacrifié sa vie. Il l'a consumée dans la douleur et dans la mort. Mais à vous
il n'en demande pas autant. Lorsque la grande majorité des membres de son
Corps Mystique portent leur petite croix de tous les jours et aiment leur
prochain comme ils s'aiment eux-mêmes, il est satisfait.
Ce n'est qu'à ses âmes de prédilection, son
élite, que Jésus propose sa Croix et son sort. Il leur dit: "Aimez-vous
comme je vous ai aimés". Et il insiste: "Personne n'aime autant que celui
qui donne sa vie pour ceux qu'il aime". Et il ajoute pour finir:
"Vous êtes mes amis si vous faites ce que j'ordonne".
La prédestination n'est jamais séparée de l'héroïsme. Les saints sont des
héros. D'une manière ou d'une autre, c'est-à-dire selon la manière que Dieu
leur propose, la vie des saints est héroïque. Ils savent ce qu'ils font, où
cela conduit de faire ce qu'ils font, mais cela ne leur fait pas peur. Ils
savent aussi que ce qu'ils font sert à continuer la Passion du Christ, à
augmenter les trésors de la Communion des Saints, à préserver le monde des
châtiments de Dieu, et à arracher à l'Enfer beaucoup d'âmes tièdes et
pécheresses qui ne pourraient se sauver de la damnation sans leur immolation.
Car la tiédeur, elle aussi, conduit l'âme à la mort. Elle le fait lentement,
par un refroidissement graduel en étouffant progressivement la charité que
chaque homme doit cultiver pour être capable de vivre en Dieu. Cette langueur
spirituelle conduit lentement l'âme à la mort.
Si la prédestination était disjointe de la volonté héroïque de la créature,
il y aurait injustice. Or, Dieu ne peut vouloir que ce qui est juste. Ici je
parle de la prédestination à la sainteté. Cette prédestination est proclamée
par la justice de la vie et par les faits extraordinaires qui, dans la vie de
la personne prédestinée et fidèle à sa prédestination de gloire, foisonnent
comme les étoiles dans le ciel, et continuent à être proclamés par des
miracles même après la mort du prédestiné.
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163> Autre chose est la prédestination à la Grâce
commune à
tous les hommes, que Dieu donne
gratuitement en mesure suffisante pour que l'homme réalise son salut, et
autre chose la prédestination à la gloire. Celle-ci est accordée à ceux qui,
pendant leur vie terrestre, font un bon usage du don de la Grâce. À ceux qui
demeurent fidèles à cette Grâce malgré les tentations et les épreuves, et
aussi malgré les dons extraordinaires que l'homme devrait toujours accepter
avec joie et reconnaissance, mais sans jamais les prétendre, et jamais
gaspiller une fois reçus, comme cela se produit lorsqu'on présume que l'amour
de prédilection dont on est l'objet donne la garantie de posséder déjà la
gloire. C'est une erreur que de s'imaginer qu'on n'a pas besoin de lutter et
de persévérer dans l'héroïsme pour parvenir à cette gloire.
Dieu n'aime pas le quiétisme dans lequel dégénèrent parfois les premiers élans d'un
esprit qui au début avait été appelé à une vie extraordinaire. L'orgueil
spirituel et la gourmandise spirituelle Lui répugnent pareillement. Ce sont
deux péchés contre lesquels les personnes, que Dieu gratifie de ses dons extraordinaires,
ne sont pas immunisées. Les
personnes à qui Dieu accorde des dons extraordinaires peuvent être confirmées
dans leur mission, ou en être privées si jugées indignes. Il s'agit du
péché de Lucifer, d'Adam et de Judas de Kérioth. Parce qu'ils avaient reçu beaucoup, ils ont voulu tout. S'étant perçus comme des "dieux" du fait que Dieu les avait
élus, sûrs de pouvoir se sauver sans aucun mérite, par le seul amour accordé
par Dieu, ils se sont rendus coupables d'un péché extrêmement grave. Ils ont
misé uniquement sur la Bonté divine. Or celle-ci est parfaite. Ils n'ont pas
songé que, si infinie soit-elle, elle ne deviendra jamais sottise ou
injustice.
Il est certain que Dieu connaît ceux qui demeureront fidèles jusqu'à la fin,
tandis que l'homme ne sait pas s'il sera fidèle jusqu'à la fin.
Cela aussi est justice. En effet, si Dieu
voulait que chaque homme fût sauvé en dépit de son libre arbitre, qui très
souvent est un obstacle à l'obtention de la gloire — car pour l'homme il
n'est pas facile de se servir convenablement du don royal du libre arbitre,
que Dieu lui accorde pour lui permettre de choisir librement les bonnes
actions et mériter ainsi de parvenir au bonheur éternel — Dieu obligerait
chaque homme à ne plus pécher.
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164> Mais si Dieu agissait ainsi, il
trahirait sa promesse à l'égard de la liberté de l'individu, que lui-même
crée avec déjà en possession de tous les dons nécessaires à distinguer le
bien du mal, à comprendre la loi morale et la loi divine, à poursuivre et à
atteindre le but de son existence.
Non seulement, mais pour chaque prédestiné disparaîtrait la cause de sa
gloire, c'est-à-dire l'héroïsme qui lui permet de rester fidèle au but pour
lequel Dieu lui a accordé l'existence, et l'héroïsme qui lui permet
d'utiliser, mais de façon sainte, les dons reçus de Dieu. Ces dons sont les
fruits admirables de l'Amour divin qui voudrait que chaque homme parvienne au
salut et au bonheur éternel, mais qui en même temps veut que l'homme soit en
condition de choisir librement entre une éternité de gloire d'une part, et
une éternité de douleur de l'autre.
Il est juste aussi que vous ignoriez votre sort final aujourd'hui. La
motivation vous ferait défaut si vous connaissiez votre futur éternel qui
stimule les justes à agir pour mériter la vision béatifique de Dieu, bonheur
sans limites. Vous risqueriez de tomber dans le quiétisme, ou dans l'orgueil,
de façon temporaire peut-être, mais suffisante pour que, ensuite, votre
expiation soit prolongée et votre degré de gloire, amoindri. Les injustes,
par contre, se sentiraient poussés à agir comme de véritables démons. Ils
parviendraient à haïr et à blasphémer Dieu ainsi qu'à haïr et à nuire à leur
prochain sans aucune retenue, sachant d'avance que l'enfer les attend.
Non. Chaque créature douée de raison doit choisir librement le but qu'elle
préfère et la voie qui lui plaît. En connaissant la Loi et la fin à laquelle
conduit l'obéissance ou la désobéissance à cette Loi, la créature possède ce
dont elle a besoin pour effectuer son choix. Mais elle doit ignorer ce que
Dieu seul connaît par son savoir infini. De la sorte le stimulus de l'amour
pur demeure actif chez les justes, qui leur méritera la gloire; et aussi de
sorte que les pervers ont toute la liberté de choisir ce qui leur plaît, de
préférer le péché et le délit à la justice et à l'amour. Ainsi, à l'heure de
la condamnation divine, les gens pervers ne pourront pas commettre l'extrême
péché contre l'Amour, en lui lançant l'accusation blasphématoire: "J'ai
vécu ainsi car tu m'avais déjà placé en enfer, et depuis toujours".
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165> La prédestination à la gloire, elle, n'est
pas un don gratuitement accordé à tous
les hommes. Elle est une conquête, outre qu'un don, à laquelle parviennent
ceux qui savent persévérer dans la justice; une conquête obtenue par le bon
usage des dons et des secours envoyés par Dieu, et par la bonne volonté qui
ne laisse rien tomber de ce que Dieu donne ou propose, mais qui fait trésor
de tout pour parvenir à la vision intuitive de Dieu et à sa possession
jubilante.
Certains parmi vous objectent: "Mais alors, la gloire est-elle seulement
pour ceux qui au moment de leur mort sont des saints? Et les autres? Le
Purgatoire est une prison moins douloureuse peut-être, mais il demeure un
lieu de contrainte, et il maintient les âmes séparées de Dieu. Les esprits en
voie de purification ne sont-ils pas aussi destinés au Ciel ?".
Ils le sont. Le jour viendra, ce sera lors
du Jugement dernier, où le Purgatoire sera aboli et ses occupants passeront
au Royaume de Dieu. Les Limbes, eux aussi disparaîtront car le Rédempteur a
racheté tous les hommes qui suivent la justice pour honorer le Dieu de leur
foi, et pour s'approcher de lui tel qu'ils le connaissent, de toutes leurs
forces.
Mais, qu'il sera long pour eux le chemin de l'exil après leur vie terrestre !
Qu'il sera long aussi pour ceux qui, bien que catholiques, font le strict
minimum pour garder allumée la flamme de leur amour, se contentant de faire à
peine le nécessaire pour ne pas mourir en état de péché mortel !
Quelle différence entre ces derniers, — sauvés plus que par leurs mérites,
par les mérites infinis du Sauveur, par l'intercession de Marie, par les
trésors de la communion des Saints, les prières et les sacrifices des justes
— et ceux qui auront voulu la gloire non par égoïsme mais par amour de Dieu !
Quelle distance entre ces deux catégories de personnes ! Les premières
traînent comme une lourde chaîne un amour qu'ils ont réduit au minimum, elles
le traînent avec bien des arrêts, bien de fatigue, bien de murmures de
mécontentement, bien d'égarements sur des voies d'égoïsme. Les deuxièmes,
elles, imitent Jésus Christ, "aiment comme Jésus a aimé" en donnant
même sa vie, en acceptant chacune de leurs croix et en invoquant même
d'autres comme don suprême pour sauver les âmes de leur prochain. Ce sont les
âmes-victimes. Aux yeux de Dieu, elles se montrent depuis toujours comme "les amis
de Jésus", car elles font ce
que lui leur demande de faire !
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166> Éternel présent : "Vous
êtes mes amis". Dieu connaît. Conditionnel individuel: "Si vous
faites". La conquête d'une amitié exige des actions capables de gagner
cette amitié. Mais savoir avec certitude que ces actions vous aident à
conquérir l'amitié qui vous intéresse, vous pousse à les accomplir. Ce qui se
produit entre les hommes, se produit aussi, et plus parfaitement, entre Dieu
et l'homme.
Jésus, lorsque ses leçons étaient déjà devenues des faits, et que leurs
exemples avaient illustré ses paroles, donne sa dernière leçon aux apôtres
pour qu'ils puissent atteindre la perfection nécessaire pour être appelés
"amis". Et il s'agit de la perfection que Jésus demande à tous les
prédestinés à une gloire rapide, la gloire que procure une vie de justice
héroïque, parsemée de faits extraordinaires, et prouvée par les miracles qui
surviennent après la mort. "Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je
vous ordonne". "Vous l'êtes" déjà : c'est une récompense
immédiate pour l'effort que vous vous apprêtez à faire.
Jésus connaissait ses apôtres de la même
façon qu'il connait chacun de vous. Il les considérait, comme du reste il
vous considère, vous aussi, comme des êtres affaiblis par l'héritage d'Adam,
des êtres alourdis par les nombreux éléments qui gênent votre élévation dans
les sphères de la perfection. Il sait, et depuis toujours, quelle puissance
énorme possède l'amour prodigué à l'avance pour favoriser la réciprocité.
L'homme est comme un enfant qui, graduellement, apprend à devenir adulte et à
se rendre indépendant du secours d'autrui; il l'apprend à travers tout ce qui
lui permet de se reconnaître comme un incapable qui a besoin d'être aidé en
tout pour grandir, se nourrir, marcher. Tout homme a besoin en effet d'être
aidé par ceux qui sont déjà formés, par ceux qui ont déjà atteint l'âge
parfait sur le plan physique, intellectuel et spirituel.
Alors Jésus se fait "mère" pour transformer l'homme, qui est
"un enfant sur le plan spirituel", en adulte de la race choisie, en
membre du sacerdoce royal, en hostie vivante qui continuellement s'offre à
Dieu, comme le Christ, avec le Christ et pour le Christ, de façon à pouvoir
continuer le sacrifice perpétuel qui a commencé avec le Christ et ne
connaîtra son terme qu'à la fin des siècles.
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167> Le lait avec lequel il vous nourrit,
c'est sa Charité. Les bras avec lesquels il vous soutient, c'est sa Charité.
Les paroles qu'il vous dit pour vous apprendre la vraie sagesse de la vie,
sont sa Charité.
L'Évangile de Saint Luc dit : "Parce qu'elle a beaucoup aimé, il
lui a été beaucoup pardonné". Mais qui a emmené à la rédemption cette pécheresse, qui
l'a emmenée à beaucoup aimer Celui
qui est Saint, sinon le grand amour
que le Rédempteur a eu pour elle ? Je l'ai dit : En chaque homme il y a un
Adam. Et j'ajoute : "en chaque créature humaine il y a une Marie de
Magdala". Ce qui sauve souvent l'âme pécheresse, c'est l'amour infini
que Dieu a pour elle.
En vérité vous avez été rachetés par l'amour
avant même de l'avoir été par le Sang et par la Mort du Fils de Dieu. Le Sang
et la Mort ont été l'accident final de votre rédemption. Mais l'amour que
Dieu a pour vous, c'est l'éternel état de Dieu par rapport à vous. Cet amour
divin a commencé à vous sauver depuis l'éternité, car vous étiez dans la
pensée divine avant même le début du temps. Vous y étiez tous, à partir
d'Adam jusqu'au dernier vivant. Vous y étiez avec vos actes d'héroïsme et vos
égarements, vos trésors et vos misères. Vous y étiez avec votre grand besoin
d'être très fortement aidés, divinement aidés, pour arriver au terme pour
lequel vous avez été créés. Dans son Savoir et dans son Vouloir divins,
l'Amour avait déjà établi "depuis le début" ce qui était nécessaire
pour vous ramener à la Vie comme Humanité et comme individus. Par amour pour
vous il a embrassé tout ce qui s'appelle douleur et sacrifice. Pour vous qui
parfois êtes si ingrats et souvent si faibles, il s'est immolé depuis toujours.
Si seulement vous contempliez l'héroïque vouloir du Fils de Dieu, le futur
Christ, qui est tel depuis toujours, qui est tel depuis bien avant la
Rédemption, depuis bien avant sa Naissance, depuis bien avant son
Incarnation, depuis le commencement du
monde et bien avant le commencement du monde, en reculant l'immensité
d'un temps qui n'est plus temps mais "éternité", vous comprenez que
c'est par amour que vous êtes sauvés.
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168> De même que "au commencement
le Verbe était auprès de Dieu", de même "au commencement l'amour était auprès de
Dieu", plus: il était Dieu. En
effet, Dieu n'est qu'Amour. De même qu'il est écrit: "Tout a été fait
par Lui", de même il convient d'écrire: "Tout a été fait par
le moyen de l'Amour".
Tout le créé, visible et invisible, est
l'œuvre de l'amour. Toutes les providences, ainsi que les lois physiques,
morales et surnaturelles, sont le produit de l'amour. Toutes les actions de
Dieu sont le produit de l'amour.
Amour, la création de l'univers.
Amour, la création particulière de l'homme, fils adoptif de Dieu.
Amour, l'Incarnation du Verbe.
Amour, la Passion pour racheter l'être humain.
Amour, l'Eucharistie. Amour, l'Église, dispensatrice de la grâce et Guide
pour les fidèles.
Amour, les dons qu'accorde à ceux qui le reçoivent dignement, le Paraclet, le
Théologien des théologiens.
C'est lui qui dispense la Sagesse, l'Intelligence, le Conseil, la Force, la
Science, la Piété et la Crainte de Dieu. L'Amour du Père et du Fils, c'est
lui. Le Fécondateur et le Sanctificateur de ceux qui savent le garder auprès
d'eux par une vie pure et sainte, c'est lui.
Le parfait Amour Un et Trine vous comble de lui-même et de ses richesses pour
vous rendre parfaits sur Terre et bienheureux au Ciel; et le Christ vous
propose les deux perfections par lesquelles vous parviendrez à la gloire
éternelle.
En tant que Verbe s'adressant à des créatures divinisées par la Grâce, Jésus
vous propose la même sainteté que celle de son Père : "Soyez
parfaits comme votre Père qui est dans les cieux". En tant que Maître s'adressant à des hommes semblables
à lui dans la chair et dans l'âme, lui, l'Homme, vous propose sa propre
sainteté: "Apprenez de moi. Je vous ai donné l'exemple afin que vous
fassiez comme moi j'ai fait. Vous serez bienheureux si vous mettez en
pratique mon exemple. Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous
ordonne".
Au centre de ces deux modes parallèles de
sainteté, vous avez le Christ, voie, pour vous, de la Vie éternelle. En
effet, le Christ réunit en lui-même, comme Verbe, Fils de Dieu, la sainteté
de Dieu; comme Jésus, Fils de Marie Immaculée, il a la parfaite justice de
l'Homme innocent, plein de Grâce et de Vérité.
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169> Puisque "vous êtes dieux et
fils du Très-Haut", ô hommes, rachetés du Christ, vous pouvez et vous devez, comme fils de Dieu et fils de l'Homme,
imiter votre frère Jésus, vous pouvez et vous devez devenir des Christ
vous-mêmes, des vrais fils de Dieu, héritiers du Ciel. Réaliser cela n'est
pas impossible. Jésus vous a montré que c'est possible.
Si le Verbe se fût manifesté uniquement comme Parole divine, s'il se fût
manifesté uniquement comme Maître spirituel et incréé, de la façon où Dieu
s'est manifesté aux Patriarches et aux Prophètes avant la naissance du
Christ, l'homme affolé aurait pu, selon les cas, ou gémir ou maudire:
"Moi charnel, moi le perpétuel Adam que je suis, enclin au péché et
faible de nature, de quelle façon puis-je faire ce que tu m'enseignes, toi
qui es Esprit très pur, toi qui ne connais pas les tentations de Satan, toi
qui n'as aucune imperfection de nature ?". Ou alors il aurait pu lancer
des imprécations du genre: "Pourquoi as-tu permis que je sois corrompu
dès le sein de ma mère ? Pourquoi as-tu permis que le père de l'Humanité le
fût lui aussi si tu voulais que je sois saint ? À ton insulte je réponds par
ma malédiction".
Mais le Verbe s'est fait Chair. Il a pris une nature humaine, semblable en tout à celle des frères qui
sont fils d'Abraham. Le temps qu'il fût Jésus de Nazareth, le Christ n'a pas
été dissemblable d'Adam, celui du jardin d'Eden au premier jour de la
création: plein de grâce et d'innocence. Comme Adam, lui aussi a été tenté pour être éprouvé, afin de pouvoir ainsi comprendre et aider ceux qui sont dans l'épreuve, les
comprendre et les aider grâce à sa propre expérience d'Homme et par son
exemple.
L'homme ne pourra plus se désoler en disant :
"Moi, charnel comme je suis, je ne pourrai jamais être parfait comme le
Père qui est aux Cieux, ni faire ce que le Verbe nous enseigne". Il ne
pourra pas non plus considérer comme une "dérision" l'enseignement
imparti par le Verbe à des gens qui, affaiblis dans leur nature par la
corruption originelle, ne parviennent à le mettre en pratique qu'à travers un
grand et continuel effort.
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170> L'homme ne pourra pas dire non plus :
"La loi spirituelle ne me convient pas à cause de ma sensualité
charnelle. Le contraste est trop grand entre, d'un côté, la voix extérieure
de mes membres (qui sont sous l'influence du monde qui m'entoure, et du démon
qui rôde continuellement autour de moi et tente les bas instincts de ma
nature animale ainsi que les facultés morales de ma nature rationnelle), et
de l'autre, la voix intérieure de ma conscience, qui est la voix même de
Dieu. En effet: la voix de la conscience est le rappel de Dieu à ses
créatures afin qu'elles ne s'éloignent pas de la Loi, ni la piétinent. Elle
parle au fond de mon âme pour me dire : 'Fais ceci', ou bien : 'ne fais pas
cela'. J'ai la volonté de faire le bien, oui. Je reconnais que cette Loi est
sainte, oui. Ma conscience d'homme, ainsi que la raison qui me distingue de
la brute, et qui m'a été donnée par Dieu pour que je puisse connaître,
réfléchir, choisir et vouloir ce qui est bien, me disent que cette Loi est
bonne, oui. Plus: L'impulsion divine m'habite. Lui, l'éternel moteur,
l'Immense qui communique l'immensité à ses créatures m'en fait part à moi
aussi comme à tout homme divinisé par la grâce. Fils adoptif que je suis, il
me rend capable d'accomplir de grandes œuvres. Elles devraient ressembler aux
siennes, si grandes et si parfaites et d'abord à la première et la plus
grande qui est celle de tendre à lui avec tout mon amour. Car c'est lui, en
vérité, mon Bien unique. Et voilà que je ne réussis pas à faire le bien que
je veux, mais je cède au mal qui fermente en moi. Plus fort que le
bien".
Non. Vous ne pouvez plus dire cela. Le mal est grand, d'accord. Grand est
l'héritage du mal qui vous habite, c'est vrai. Le mal qui se cache pour vous
nuire dans les circonstances de la vie (le monde) est encore plus grand,
c'est vrai aussi. Très grand est le mal qui porte le nom de Satan, principe
de tout Mal, monstre dévorant et insatiable, haine éternelle vivante et
inlassable du Créateur et de ses créatures. Mais il y en a Un seul qui est
l'infini : Dieu. Or, l'homme divinisé garde en lui la Grâce, c'est-à-dire
Dieu. Dieu Charité, Dieu Intelligence, Dieu Sainteté, Dieu Force, Dieu
Puissance, Dieu Sagesse, Dieu Vie, Dieu Beauté, Dieu Vérité, Dieu Bonté, Dieu
Pureté. En Dieu, il y a tout cela au niveau de la plus haute et infinie
perfection. Dieu est le Tout.
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171> L'homme de bonne volonté peut tout s'il
demeure uni à Jésus Christ. Ce Jésus qui, pour que l'éclat divin de la Loi du
Sinaï ne vous cause pas des frayeurs avec les quatre obligations et les six
prohibitions de la Loi du Sinaï, qui vous épouvantent.- depuis que votre intégrité fut
blessée dans l'Eden et que la loi désordonnée des sens lutte ou prime en vous
sur la raison, – résume et parachève la Loi toute entière en un double
commandement d'amour qu'il vous présente dans le doux, attrayant et joyeux
vêtement de l'amour: "Aimez Dieu, aimez votre prochain".
Aimer est plus facile qu'adorer, honorer, ou s'abstenir. L'amour rapproche
l'homme de Dieu, et Dieu de l'homme. Aimer est plus attrayant que craindre.
L'amour, c'est l'échelle qui permet de monter jusqu'à l'adoration.
Il n'est pas possible à l'homme de monter
directement et d'un seul trait jusqu'aux sommets de l'adoration. Comme
intimidé, il s'arrête devant la grandeur infinie de Dieu. Il se fabrique de
lui-même les liens qui le retiennent loin de Dieu. À cette peur, très typique
des Juifs de l'ancien temps, il joint toutes les misères de sa nature. Mais
l'amour défait ces liens par son ardeur, et met à l'âme ses ailes de feu pour
monter plus haut, toujours plus haut, à mesure que ses élans lui permettent
d'oublier ce à quoi il renonce sur terre: misères, étroitesses, honneurs sans
valeur, richesses et affections transitoires. Le regard de cette âme est fixé
uniquement sur ce qu'elle gagne et conquiert: Dieu, le Ciel. Aucun acte
formel de dévotion ne vous unit à Dieu autant que l'acte d'amour spontané et
continuel.
Le fruit de l'union de l'âme avec Dieu est la sagesse. Or la sagesse conduit
à l'exercice de la justice en toute chose.
L'homme uni à Dieu est actif et joyeux. Dieu
se complaît dans les actions de ceux qui sont amoureux de lui. Et l'homme,
dans la joie que cela lui procure, trouve son élan pour continuer et
accroître son activité de bien. En effet, la paix que donne cette union avec
Dieu, si haute qu'elle soit, n'est jamais inerte.
Il n'y a pas d'inertie en Dieu. Dieu est action, depuis toute éternité. Chez
l'homme uni à Dieu par l'amour il n'y a pas d'inertie. L'homme aime Dieu
activement, et il est activement aimé par Dieu. Cette double activité produit
des feux de charité qui débordent et rayonnent sur les créatures, car l'homme
ne réussit pas à garder pour lui seul l'Amour infini qui, comme pour se
soulager, se déverse en lui comme dans un bassin digne et désireux de
l'accueillir.
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171> L'homme pris dans le tourbillon de
l'amour ardent de Dieu ne se contente plus d'aimer seulement son Créateur.
Les yeux de son esprit, et l'esprit de son âme, en contemplant le Créateur
voient en Lui aussi toutes ses créatures. Par conséquent, l'homme se sent
porté à aimer saintement toutes les créatures comme autant de réalisations de
son Amour adoré.
Voilà que prend naissance l'amour du prochain. Le voilà qui jaillit et se
répand comme conséquence sainte et immanquable du saint amour de Dieu. Exercé
avec justice, l'amour du prochain place chaque créature à son juste niveau,
toujours inférieur à celui de Dieu, même si la créature est la plus chère qui
soit par les liens du sang ou ceux de l'amitié, et même s'il s'agit de la
plus sainte des créatures par la justice de sa vie. Jamais l'amour du
prochain exercé avec justice ne fait passer la créature devant le Créateur.
Il la regarde, elle aussi, comme un nouveau don de Dieu, comme un don que
Dieu accorde pour rendre plus facile, plus agréable, plus douce et plus
méritoire la vie de celui qui transite sur Terre.
Voilà comment, grâce à l'amour, l'homme conquiert cette liberté sublime par
laquelle il se voit affranchi des pièges de son moi, de ceux du monde, et de
ceux du démon, contraintes conséquentes à la Faute originelle.
La charité est feu vivant. Le feu vivant est flamme. La flamme est libre, et
elle tend vers le ciel. Elle irradie chaleur et lumière. Elle est
bienfaisante pour celui qui s'en approche. Et voici que l'homme embrassé par
la charité, par sa flamme, monte vers Dieu, le centre de tous les feux
d'amour, et en même temps il irradie ses feux sur les frères, soigne leurs
misères, éclaire leurs ténèbres, les réjouit en leur apportant la lumière qui
est Dieu. Il purifie leurs impuretés, car chaque saint est un purificateur de
ses frères. Or, celui qui aime Dieu et son prochain de toutes ses forces est
un saint. Par sa sublime piété, il est purificateur de ses frères,
bienfaiteur et consolateur des affligés, des pauvres, des malades du corps et
de l'esprit. Il prêche le Royaume de Dieu, et par là même, il l'établit en
lui-même autant que dans le monde.
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173> Le royaume de Dieu dans l'homme,
c'est l'amour. Dans l'homme et dans le monde, le royaume de Dieu, c'est
l'amour. C'est l'opposé du royaume de Satan qui, lui, est haine, égoïsme et
triple luxure.
Le Royaume de Dieu !
Il s'agit de l'oraison "notre Père" vécue. Non d'une prière
marmonnée de façon plus ou moins distraite, mais d'un "notre Père" rendu vivant, rendu "action", motivé par la volonté de
sanctifier le très saint nom de Dieu, de l'adorer en esprit et en vérité, en
s'efforçant à ce que d'autres personnes l'adorent à leur tour. Oui, pour
qu'ils adorent Dieu ! Aussi bien par l'obéissance à sa loi — donnée pour
orienter l'homme vers la religion (c'est-à-dire vers l'union à Dieu et avec
les frères qu'on voit en Lui) — que par le respect de vénération des droits
de Dieu et le respect fraternel des droits du prochain.
Le "notre Père" est rendu vivant grâce à l'instauration du Royaume
de Dieu dans les créatures et dans le monde, par le double amour de Dieu et
du prochain, chemin vers la possession du Royaume des Cieux.
Le "notre Père" est rendu vivant par l'adhésion à la volonté de
Dieu, quelle qu'elle soit. Il est rendu vivant par le double amour [de Dieu
et du prochain]. Le premier vous permet d'accepter, dans un état d'obéissance
pacifique, et comme venant de la main de Dieu, les épreuves, les peines, les
agonies et les deuils. Le second vous fait supporter votre prochain lorsqu'il
vous cause des souffrances, et d'accepter comme "moyen" d'accroissement de vos mérites éternels, avec
patience continuelle — qu'il vous faut exercer envers ceux qui vous mettent à
l'épreuve — vos pauvres frères coupables contre l'amour, pour lesquels il
faudra miséricorde et prière pour qu'ils retrouvent la voie de la Vie.
Le "notre Père" est rendu vivant dans la charité la plus difficile
qui soit: celle du pardon. Il s'agit du pardon accordé à vos propres
offenseurs, et offert au Dieu-Amour afin qu'il vous pardonne les offenses que
vous-mêmes avez commises contre lui.
La charité est la plus grande des purifications, et elle peut être
continuelle: une ablution ininterrompue de vos propres imperfections,
accomplie par les flammes de ce double amour. La charité est aussi la Loi
spirituelle mise en pratique.
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174> L'homme
charnel peut la mettre, lui aussi, en pratique, car la charité va
toujours de pair avec la foi. Celle-ci, par les vérités qu'elle vous propose,
vous exhorte à dépasser les obstacles de la vie, en vue de l'Origine et de la
Fin de toute créature: c'est-à-dire de Celui qui vous a créés, et pourquoi,
et pour quelle destinée; de Celui qui vous aide à parvenir à une telle
destinée de bonheur, et qui vous assure que cette destinée de bonheur est
l'héritage qui attend tout homme vivant selon la justice.
Chaque vérité révélée vous parle de la
bonté, de la providence et de la justice du Seigneur Un et Trine. Bon,
pourvoyant, juste, Dieu, Père, Créateur,
qui "a disposé toutes choses selon leur mesure, leur nombre et leur
poids", et les a toutes ordonnées à leur propre fin. À l'homme,
dont la destinée finale est surnaturelle, il a donné, à part la Grâce — qui
est le moyen indispensable pour atteindre la destinée surnaturelle —, la
raison et la conscience. Par ces dons, l'homme est en mesure de connaître et
de suivre la loi morale naturelle, qui n'a pas été écrite sur quelque matière
périssable, par un législateur faillible, et lui-même périssable. Elle a été
écrite sur les pages spirituelles et donc immortelles de l'âme, par le doigt
de Dieu, de façon à ce que rien ne puisse l'altérer, sauf la volonté de
l'homme rebelle. D'ailleurs, même si l'homme rebelle parvient à fuir cette
Loi en étouffant avec le hurlement de ses sens effrénés la voix de sa raison
et celle de sa conscience, il ne parvient pas à étouffer ces voix intérieures
pour toujours. Ces voix sont la voix même de Dieu. Voix qui résonne à
l'intérieur de chaque homme, qu'il soit catholique ou infidèle, schismatique,
juif, hérétique, séparé ou excommunié, peu importe, pour que toute créature
rationnelle connaisse les prescriptions de l'éternelle Loi du Bien, et vive
en accord avec elles, si elle le veut.
Bon, pourvoyant, juste, Dieu le Fils,
Sauveur, qui s'est incarné pour être Jésus, et qui est mort pour vous
permettre de redevenir "une seule chose avec Dieu", comme des fils formant un seul amour avec leur père. Il
est ressuscité, puis monté aux Cieux non seulement pour donner aux hommes la
preuve principale de sa Divinité, mais aussi pour que vous ayez une garantie
de l'existence de la résurrection finale de la chair
et de celle du Royaume des Cieux. Ceux qui auront vécu dans le Seigneur et
qui seront morts dans le Seigneur, eux aussi monteront au Ciel pour jouir de
la vision béatifique de Dieu et parviennent ainsi à la bienheureuse
connaissance du mystère de Dieu, mystère que nulle intelligence humaine ne
peut pénétrer.
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175/176> Bon, pourvoyant, juste, Dieu l'Esprit Saint, Sanctificateur, âme de l'Église, qu'il
vivifie avec sa Grâce et ses dons, qu'il guide, instruit, et comble d'amour
afin qu'elle soit en mesure de discerner et proclamer avec justice et sagesse
tout ce qui concerne la foi et les mœurs, et pour qu'elle applique avec amour et justice les biens spirituels
autant que les châtiments; afin qu'elle les applique avec amour et justice, c'est-à-dire libre
de toute attache personnelle aux jugements, calculs, intérêts, préjugés, ou
autres sentiments humains. Sa tâche est de guider, soutenir et instruire ses
fils, en continuant le magistère de son Époux, Chef et Seigneur, qu'elle doit servir, et non attrister en mettant des obstacles à ses Volontés,
même lorsque ces Volontés sortent de l'ordinaire. Car Dieu peut vouloir toute
sorte de bonnes choses pour ses enfants. Personne n'a le droit de juger les
actions de Dieu, ni de les condamner en essayant de leur barrer la route par
des obstacles.
L'Église existe parce que Dieu le Verbe l'a fondée selon le vouloir de Dieu
le Père, et avec l'aide de l'Esprit Saint. La Trine Unité l'a rendue très
féconde, pour que le Royaume de Dieu se propage et s'approfondisse dans les
cœurs et sur la Terre, et que l'Humanité parvienne ainsi, aussi nombreuse que
possible, au Royaume de Dieu qui est dans les Cieux.
Avec la foi on possède l'espérance, qui se nourrit de foi de la même façon
que la foi et l'espérance subsistent grâce à la Charité. L'espérance naît et
repose sur la certitude que Dieu ne ment pas et ne trahit pas ses promesses.
Par conséquent, elle donne à l'homme toute l'aide qui lui est nécessaire pour
parvenir à la bienheureuse résurrection et à la vie éternelle. C'est cela le
privilège d'avoir connu le Fils de Dieu, d'y avoir cru, et d'avoir mis en
pratique la Parole qui sauve de la mort spirituelle. Car la foi et l'union au
Christ sont vie dans le Christ, et la vie dans le Christ est "la Vie".
Et celui qui vit ainsi dans le Christ et par le Christ ne connaîtra pas la
mort. Il y a plus encore : si quelqu'un était une branche morte — branche
morte séparée du tronc de la Vigne, qui est Jésus, soit par le péché, soit
parce que le fait d'appartenir à des églises séparées, le rend tel — et
qu'ensuite, par la grâce de Dieu et par sa bonne volonté humaine, il parvient
à la première résurrection, celle de greffer sa branche à l'unique Église
Catholique, Apostolique, Romaine, il changerait sa mort spirituelle en vie.
Voilà donc que par la Charité — charité de Dieu pour l'homme, charité de
l'homme pour Dieu et pour son prochain — par la Foi, par l'Espérance, par
tout ce qui vous est transmis à travers ces trois vertus théologales, par
tout ce qu'elles produisent en vous, l'homme charnel peut suivre la Loi
spirituelle et parvenir à la gloire, même s'il est alourdi par le terrible
poids de son humanité blessée.
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