TEXTES
DE RÉFÉRENCE
Œuvres
de
Saint Irénée de Lyon
Saint Augustin d'Hippone
Saint
Bonaventure
Saint
Basile de Césarée en Cappadoce
CODE DE DROIT CANONIQUE
Codex Juris Canonici.
Constitution
dogmatique
LUMEN GENTIUM
sur l'Église
(Paul VI -21 novembre 1964)
Décret
APOSTOLICAM ACTUOSITATEM
sur l'apostolat des laïcs
(Paul VI - 18 novembre 1965)
Déclaration
DIGNITATIS HUMANAE
sur la liberté religieuse
(Paul VI - 7 décembre 1965)
Déclaration
NOSTRA AETATE
sur l'Église et les religions
non chrétiennes
(Paul VI - 28 octobre 1965)
Lettre encyclique
IMMORTALE DEI
sur la constitution chrétienne
des États
(Léon XIII – 1er novembre 1885)
Lettre encyclique
QUAS PRIMAS
sur l’institution
d'une fête du Chris-Roi
(Pie XI – 11 décembre 1925)
Lettre encyclique
LIBERTAS PRAESTANTISSIMUM
sur la liberté humaine
(Léon XIII – 20 juin 1888)
Constitution
pastorale
GAUDIUM ET SPES
sur l'Église dans le monde
de ce temps
(Paul VI - 7 décembre 1965)
Constitution
SACROSENTUM CONCILIUM
sur la Sainte Liturgie
(Paul VI - 4 décembre 1963)
|
Texte complet
des dix commandements.
"Maître, que dois-je faire... ?"
2052
"Maître, que dois-je faire de bon pour posséder la vie
éternelle ?" Au jeune homme qui lui pose cette question, Jésus
répond d’abord en invoquant la nécessité de reconnaître Dieu comme "le
seul Bon", comme le Bien par excellence et comme la source de tout bien.
Puis, Jésus lui déclare : "Siracide (Ben Sirac) tu veux entrer dans
la vie, observe les commandements". Et de citer à son interlocuteur les
préceptes qui concernent l’amour du prochain : "Tu ne tueras pas,
tu ne commettras pas d’adultère, tu ne voleras pas, tu ne porteras pas de
faux témoignage, honore ton père et ta mère". Jésus résume enfin ces
commandements d’une manière positive : "Tu aimeras ton prochain
comme toi-même"(1).
--------------------------------------
(1) Matthieu 19, 16-19.
2053
À cette première réponse, une seconde vient s’ajouter :
"Siracide (Ben Sirac) tu veux être parfait, va, vends ce que tu
possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor aux cieux ; puis
viens, suis-moi"(1). Elle n’annule pas la première. La suite de Jésus Christ
comprend l’accomplissement des commandements. La Loi n’est pas abolie(2),
mais l’homme est invité à la retrouver en la Personne de son Maître, qui en
est l’accomplissement parfait. Dans les trois évangiles synoptiques, l’appel
de Jésus adressé au jeune homme riche, de le suivre dans l’obéissance du
disciple et dans l’observance des préceptes, est rapproché de l’appel à la
pauvreté et à la chasteté(3). Les conseils évangéliques sont indissociables des
commandements.
--------------------------------------
(1) Matthieu 19, 21 – (2) cf. Matthieu 5, 17 – (3) cf. Matthieu 19, 6-12. 21.
23-29.
2054
Jésus a repris les dix commandements, mais il a manifesté la force de
l’Esprit à l’œuvre dans leur lettre. Il a prêché la "justice qui
surpasse celle des scribes et des pharisiens"(1)
aussi bien que celle des païens(2). Il a déployé toutes les
exigences des commandements. "Vous avez entendu qu’il a été dit aux
ancêtres : Tu ne tueras pas ... Eh bien ! Moi je vous dis :
quiconque se fâche contre son frère en répondra au tribunal"(3).
--------------------------------------
(1) Matthieu 5, 20 – (2) cf. Matthieu 5, 46-47 – (3) Matthieu 5, 21-22.
2055
Lorsqu’on lui pose la question : "Quel est le plus grand
commandement de la Loi ?"(1), Jésus répond :
"Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et
de tout ton esprit ; voilà le plus grand et le premier commandement. Le
second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. À ces
deux commandements se rattache toute la Loi, ainsi que les Prophètes"(2).
Le Décalogue doit être interprété à la lumière de ce double et unique
commandement de la charité, plénitude de la Loi :
Le précepte : tu ne commettras pas d’adultère ; tu ne tueras
pas ; tu ne voleras pas ; tu ne convoiteras pas, et tous les autres
se résument en ces mots : tu aimeras ton prochain comme toi-même. La
charité ne fait point de tort au prochain. La charité est donc la loi dans sa
plénitude(3).
--------------------------------------
(1) Matthieu 22, 36 – (2) Matthieu 22, 37-40 ; cf. Deutéronome 6, 5 ;
Lévitique 19, 18 – (3) Romains 13, 9-10.
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Le Décalogue dans l’Écriture Sainte.
2056
Le mot "Décalogue" signifie littéralement "dix
paroles"(1). Ces "dix paroles", Dieu les a révélées à son
peuple sur la montagne sainte. Il les a écrites "de son Doigt"(2), à
la différence des autres préceptes écrits par Moïse(3).
Elles constituent des paroles de Dieu à un titre éminent. Elles nous sont
transmises dans le livre de l’Exode(4) et dans celui du
Deutéronome(5). Dès l’Ancien Testament, les livres saints font
référence aux "dix paroles"(6). Mais c’est dans la
nouvelle Alliance en Jésus Christ que leur plein sens sera révélé.
--------------------------------------
(1) Exode 34, 28 ; Deutéronome 4, 13 ; 10, 4 – (2) Exode 31, 18 ; Deutéronome
5, 22 – (3) cf. Deutéronome 31, 9. 24 – (4) cf. Exode 20, 1-17 – (5) cf.
Deutéronome 5, 6-22 – (6) cf. par exemple Osée 4, 2 ; Jérémie 7, 9 ; Ezéchiel
18, 5-9.
2057
Le Décalogue se comprend d’abord dans le contexte de l’Exode qui est le grand
événement libérateur de Dieu au centre de l’ancienne Alliance. Qu’ils soient
formulés comme des préceptes négatifs, des interdictions, ou comme des
commandements positifs (comme : "honore ton père et ta mère"),
les "dix paroles" indiquent les conditions d’une vie libérée de
l’esclavage du péché. Le Décalogue est un chemin de vie :
"Siracide (Ben Sirac) tu aimes ton Dieu, si tu marches dans ses voies,
si tu gardes ses commandements, ses lois et ses coutumes, tu vivras et tu te
multiplieras"(1).
Cette force libératrice du Décalogue apparaît par exemple dans le
commandement sur le repos du sabbat, destiné également aux étrangers et aux
esclaves :
Souvenez-vous : vous étiez des esclaves sur une terre étrangère. Le
Seigneur votre Dieu vous en a fait sortir à main forte et à bras étendu(2).
--------------------------------------
(1) Deutéronome 30, 14 –(2) Deutéronome 5, 15.
2058
Les "dix paroles" résument et proclament la loi de
Dieu : "Telles sont les paroles que vous adressa le Seigneur quand
vous étiez tous assemblés sur la montagne. Il vous parla du milieu du feu,
dans la nuée et les ténèbres d’une voix puissante. Il n’y ajouta rien et les
écrivit sur deux tables de pierre qu’il me donna"(1).
C’est pourquoi ces deux tables sont appelées "le Témoignage"(2).
Elles contiennent en effet les clauses de l’alliance conclue entre Dieu et
son peuple. Ces "tables du Témoignage"(3)
doivent être déposées dans "l’arche"(4).
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(1) Deutéronome 5, 22 – (2) Exode 25, 16 – (3) Exode 31, 18 ; 32, 15 ; 34, 29
– (4) Exode 25, 16 ; 40, 1-2.
2059
Les "dix paroles" sont prononcées par Dieu au sein d’une
théophanie(1) ("Sur la montagne, au milieu du feu, le Seigneur
vous a parlé face à face")(2).
Elles appartiennent à la révélation que Dieu fait de lui-même et de sa
gloire. Le don des commandements est don de Dieu lui-même et de sa sainte
volonté. En faisant connaître ses volontés, Dieu se révèle à son peuple.
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(1) Théophanie = manifestation de Dieu – (2) Deutéronome 5, 4.
2060
Le don des commandements et de la Loi fait partie de l’Alliance scellée
par Dieu avec les siens. Suivant le livre de l’Exode, la révélation des
"dix paroles" est accordée entre la proposition de l’Alliance(1) et
sa conclusion(2), – après que le peuple se soit engagé à
"faire" tout ce que le Seigneur avait dit, et à y "obéir"(3).
Le Décalogue n’est jamais transmis qu’après le rappel de l’Alliance ("Le
Seigneur, notre Dieu, a conclu avec nous une alliance à l’Horeb")(4).
--------------------------------------
(1) cf. Exode 19 – (2) cf. Exode 24 – (3) Exode 24, 7 – (4) Deutéronome 5, 2.
2061
Les commandements reçoivent leur pleine signification à l’intérieur de
l’Alliance. Selon l’Écriture, l’agir moral de l’homme prend tout son sens
dans et par l’Alliance. La première des "dix paroles" rappelle
l’amour premier de Dieu pour son peuple :
Comme il y avait eu, en châtiment du péché, passage du paradis de la liberté
à la servitude de ce monde, pour cette raison, la première phrase du
Décalogue, première parole des commandements de Dieu, porte sur la liberté
"Moi, je suis le Seigneur, ton Dieu, qui t’ai fait sortir de la terre
d’Égypte, de la maison de servitude"(1)(2).
--------------------------------------
(1) Exode 20, 2 ; Deutéronome 5, 6 – (2) Origène, Homélies sur l'Exode, 8, 1
2062
Les commandements proprement dits viennent en second lieu ; ils
disent les implications de l’appartenance à Dieu instituée par l’Alliance.
L’existence morale est réponse à l’initiative aimante du Seigneur.
Elle est reconnaissance, hommage à Dieu et culte d’action de grâce. Elle est
coopération au dessein que Dieu poursuit dans l’histoire.
2063
L’alliance et le dialogue entre Dieu et l’homme sont encore attestés du
fait que toutes les obligations sont énoncées à la première personne
("Je suis le Seigneur ...") et adressées à un autre sujet ("tu
..."). Dans tous les commandements de Dieu, c’est un pronom personnel singulier
qui désigne le destinataire. En même temps qu’à tout le peuple, Dieu fait
connaître sa volonté à chacun en particulier :
Le Seigneur prescrivit l’amour envers Dieu et enseigna la justice envers le
prochain, afin que l’homme ne fut ni injuste, ni indigne de Dieu. Ainsi, par
le Décalogue, Dieu préparait l’homme à devenir son ami et à n’avoir qu’un
seul cœur avec son prochain .... Les paroles du Décalogue demeurent pareillement
chez nous [chrétiens]. Loin d’être abolies, elles ont reçu amplification et
développement du fait de la venue du Seigneur dans la chair(1).
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(1) Saint Irénée de Lyon, Adversus hæreses, 4, 16, 3-4.
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Le Décalogue dans la Tradition de l’Église.
2064
En fidélité à l’Écriture et conformément à l’exemple de Jésus, la
Tradition de l’Église a reconnu au Décalogue une importance et une
signification primordiales.
2065
Depuis saint Augustin, les "dix
commandements" ont une place prépondérante dans la catéchèse des futurs
baptisés et des fidèles. Au quinzième siècle, on prit l’habitude d’exprimer
les préceptes du Décalogue en formules rimées, faciles à mémoriser, et
positives. Elles sont encore en usage aujourd’hui. Les catéchismes de
l’Église ont souvent exposé la morale chrétienne en suivant l’ordre des
"dix commandements".
2066
La division et la numérotation des commandements a varié au cours de
l’histoire. Le présent catéchisme suit la division des commandements établie
par saint Augustin et devenue traditionnelle dans l’Église catholique. Elle
est également celle des confessions luthériennes. Les Pères grecs ont opéré
une division quelque peu différente qui se retrouve dans les Églises
orthodoxes et dans les communautés réformées.
2067
Les dix commandements énoncent les requêtes de l’amour de Dieu et du
prochain. Les trois premiers se rapportent davantage à l’amour de Dieu, et
les sept autres à l’amour du prochain.
Comme la charité comprend deux préceptes auxquels le Seigneur rapporte toute
la loi et les prophètes ..., ainsi les dix préceptes sont eux-mêmes divisés
en deux tables. Trois ont été écrits sur une table et sept sur l’autre (1).
--------------------------------------
(1) Saint Augustin, Sermons, 33, 2,
2
2068
Le Concile de Trente enseigne que les dix commandements obligent les
chrétiens et que l’homme justifié est encore tenu de les observer(1).
Et le Concile Vatican II l’affirme : "Les évêques, successeurs des
apôtres, reçoivent du Seigneur ... la mission d’enseigner toutes les nations
et de prêcher l’Évangile à toute créature, afin que tous les hommes, par la
foi, le baptême et l’accomplissement des commandements, obtiennent le
salut"(2).
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(1) cf. Denzinger-Schönmetzer 1569-1570 – (2) Lumen gentium 24.
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L’unité du Décalogue.
2069
Le Décalogue forme un tout indissociable. Chaque "parole"
renvoie à chacune des autres et à toutes ; elles se conditionnent
réciproquement. Les deux Tables s’éclairent mutuellement ; elles forment
une unité organique. Transgresser un commandement, c’est enfreindre tous les
autres(1). On ne peut honorer autrui sans bénir Dieu son Créateur.
On ne saurait adorer Dieu sans aimer tous les hommes ses créatures. Le
Décalogue unifie la vie théologale et la vie sociale de l’homme.
--------------------------------------
(1) cf. Jacques 2, 10-11.
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Le Décalogue et la loi naturelle.
2070
Les dix commandements appartiennent à la révélation de Dieu. Ils nous
enseignent en même temps la véritable humanité de l’homme. Ils mettent en
lumière les devoirs essentiels, et donc indirectement, les droits
fondamentaux, inhérents à la nature de la personne humaine. Le Décalogue
contient une expression privilégiée de la "loi naturelle" :
Dès le commencement, Dieu avait enraciné dans le cœur des hommes les
préceptes de la loi naturelle. Il se contenta d’abord de les leur rappeler.
Ce fut le Décalogue(1).
--------------------------------------
(1) Saint Irénée de Lyon, Contre les
hérésies, 4, 15, 1
2071
Bien qu’accessibles à la seule raison, les préceptes du Décalogue ont été
révélés. Pour atteindre une connaissance complète et certaine des exigences
de la loi naturelle, l’humanité pécheresse avait besoin de cette
révélation :
Une explication plénière des commandements du Décalogue fut rendue nécessaire
dans l’état de péché à cause de l’obscurcissement de la lumière de la raison
et de la déviation de la volonté(1).
Nous connaissons les commandements de Dieu par la révélation divine qui nous
est proposée dans l’Église, et par la voix de la conscience morale.
--------------------------------------
(1) Saint Bonaventure, In libros sententiarum, 4, 37,
1, 3
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L’obligation du Décalogue.
2072
Puisqu’ils expriment les devoirs fondamentaux de l’homme envers Dieu
et envers son prochain, les dix commandements révèlent, en leur contenu
primordial, des obligations graves. Ils sont foncièrement immuables et
leur obligation vaut toujours et partout. Nul ne pourrait en dispenser. Les
dix commandements sont gravés par Dieu dans le cœur de l’être humain.
2073
L’obéissance aux commandements implique encore des obligations dont
la matière est, en elle-même, légère. Ainsi l’injure en parole est-elle
défendue par le cinquième commandement, mais elle ne pourrait être une faute
grave qu’en fonction des circonstances ou de l’intention de celui qui la
profère.
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"Hors de moi, vous ne pouvez rien faire".
2074
Jésus dit : "Je suis la vigne ; vous êtes les
sarments. Celui qui demeure en moi et moi en lui, celui-là porte beaucoup de
fruit ; car hors de moi, vous ne pouvez rien faire"(1).
Le fruit évoqué dans cette parole est la sainteté d’une vie fécondée par
l’union au Christ. Lorsque nous croyons en Jésus Christ, communions à ses
mystères et gardons ses commandements, le Sauveur vient lui-même aimer en
nous son Père et ses frères, notre Père et nos frères. Sa personne devient,
grâce à l’Esprit, la règle vivante et intérieure de notre agir. "Voici
quel est mon commandement : vous aimer les uns les autres, comme je vous
ai aimés"(2).
--------------------------------------
(1) Jean 15, 5 – (2) Jean 15, 12.
En bref
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2075
"Que dois-je faire de bon pour posséder la vie éternelle ?" –
"Siracide (Ben Sirac) tu veux entrer dans la vie, observe les
commandements" (Matthieu 19, 16-17).
2076
Par sa pratique et par sa prédication,
Jésus a attesté la pérennité du Décalogue.
2077
Le don du Décalogue est accordé à
l’intérieur de l’Alliance conclue par Dieu avec son peuple. Les commandements
de Dieu reçoivent leur signification véritable dans et par cette Alliance.
2078
En fidélité à l’Écriture et conformément à l’exemple de Jésus, la
Tradition de l’Église a reconnu au Décalogue une importance et une
signification primordiales.
2079
Le Décalogue forme une unité organique où chaque "parole" ou
"commandement" renvoie à tout l’ensemble. Transgresser un
commandement, c’est enfreindre toute la Loi (cf. Jacques 2, 10-11).
2080
Le Décalogue contient une expression privilégiée de la loi naturelle. Il
nous est connu par la révélation divine et par la raison humaine.
2081
Les dix commandements énoncent, en leur contenu fondamental, des
obligations graves. Cependant, l’obéissance à ces préceptes implique aussi
des obligations dont la matière est, en elle-même, légère.
2082
Ce que Dieu commande, Il le rend possible par sa grâce.
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Chapitre premier :
"Tu aimeras le Seigneur ton dieu
de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit"
2083
Jésus a résumé les devoirs de l’homme envers Dieu par cette parole :
"Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et
de tout ton esprit"(1). Celle-ci fait immédiatement écho à l’appel
solennel : "Écoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est
l’unique"(2).
Dieu a aimé le premier. L’amour du Dieu Unique est rappelé dans la première
des "dix paroles". Les commandements explicitent ensuite la réponse
d’amour que l’homme est appelé à donner à son Dieu.
--------------------------------------
(1) Matthieu 22, 37 ; cf. Luc 10, 27 : " ... toutes tes forces " –
(2) Deutéronome 6, 4-5.
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Article 1
Le Premier commandement.
Je
suis le Seigneur, ton Dieu, qui t’ai fait sortir du
pays d’Egypte, de la maison de servitude. Tu n’auras pas d’autres dieux que
moi. Tu ne te feras aucune image sculptée, rien qui ressemble à ce qui est
dans les cieux là-haut, ou sur la terre ici-bas, ou dans les eaux en dessous
de la terre. Tu ne te prosterneras pas devant ces images ni ne les serviras(1).
Il est écrit : "C’est le Seigneur, ton Dieu, que tu adoreras, et à
Lui seul tu rendras un culte"(2).
--------------------------------------
(1) Exode 20, 2-5 ; cf. Deutéronome 5, 6-9 – (2) Matthieu 4, 10.
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I. "Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras".
2084
Dieu se fait connaître en rappelant son action toute-puissante,
bienveillante et libératrice dans l’histoire de celui auquel il
s’adresse : "Je t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de
servitude". La première parole contient le premier commandement de la
loi : "Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et tu le serviras ...
Vous n’irez pas à la suite d’autres dieux"(1). Le premier appel
et la juste exigence de Dieu est que l’homme l’accueille et l’adore.
--------------------------------------
(1) Deutéronome 6, 13-14.
2085
Le Dieu unique et vrai révèle d’abord sa gloire à Israël(1).
La révélation de la vocation et de la vérité de l’homme est liée à la
révélation de Dieu. L’homme a la vocation de manifester Dieu par son agir en
conformité avec sa création "à l’image et à la ressemblance de
Dieu" :
"Il n’y aura jamais d’autre Dieu, Tryphon, et
il n’y en a pas eu d’autre, depuis les siècles ... que celui qui a fait et
ordonné l’univers. Nous ne pensons pas que notre Dieu soit différent du
vôtre. Il est le même qui a fait sortir vos pères d’Égypte "par sa main
puissante et son bras élevé". Nous ne mettons pas nos espérances en
quelque autre, il n’y en a pas, mais dans le même que vous, le Dieu
d’Abraham, d’Isaac et de Jacob"(2).
--------------------------------------
(1) cf. Exode 19, 16-25 ; 24, 15-18 – (2) Saint Justin, Dialogues avec le juif Tryphon, 11, 1.
2086
"Le premier des préceptes embrasse la foi, l’espérance et la charité.
Qui dit Dieu, en effet, dit un être constant, immuable, toujours le même,
fidèle, parfaitement juste. D’où il suit que nous devons nécessairement
accepter ses Paroles, et avoir en lui une foi et une confiance entières. Il
est tout-puissant, clément, infiniment porté à faire du bien. Qui pourrait ne
pas mettre en lui toutes ses espérances ? Et qui pourrait ne pas l’aimer
en contemplant les trésors de bonté et de tendresse qu’il a répandus sur
nous ? De là cette formule que Dieu emploie dans la Sainte Écriture soit
au commencement, soit à la fin de ses préceptes : Je suis le
Seigneur"(1).
--------------------------------------
(1) Catechismus Romanus 3, 2, 4.
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La foi.
2087
Notre vie morale trouve sa source dans la foi en Dieu qui nous révèle son
amour. Saint Paul parle de "l'obéissance de la foi"(1)
comme de la première obligation. Il fait voir dans la "méconnaissance de
Dieu" le principe et l’explication de toutes les déviations morales(2).
Notre devoir à l’égard de Dieu est de croire en Lui et de Lui rendre
témoignage.
--------------------------------------
(1) Romains 1, 5 ; 16, 2 – (2) cf. Romains 1, 18-32.
2088
Le premier commandement nous demande de nourrir et de garder avec
prudence et vigilance notre foi et de rejeter tout ce qui s’oppose à elle. Il
y a de diverses manières de pécher contre la foi :
Le doute volontaire portant sur la foi néglige ou refuse de tenir pour
vrai ce que Dieu a révélé et que l’Église propose à croire. Le doute
involontaire désigne l’hésitation à croire, la difficulté de surmonter
les objections liées à la foi ou encore l’anxiété suscitée par l’obscurité de
celle-ci. S’il est délibérément cultivé, le doute peut conduire à
l’aveuglement de l’esprit.
2089
L’incrédulité est la négligence de la vérité révélée ou le
refus volontaire d’y donner son assentiment. "L’hérésie est la
négation obstinée, après la réception du baptême, d’une vérité qui doit être
crue de foi divine et catholique, ou le doute obstiné sur cette vérité. L’apostasie
est le rejet total de la foi chrétienne. Le schisme est le refus de la
soumission au Souverain Pontife ou de communion avec les membres de l’Église
qui lui sont soumis"(1).
--------------------------------------
(1) Codex Juris Canonici, canon
751.
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L’Espérance.
2090
Lorsque Dieu se révèle et appelle l’homme, celui-ci ne peut répondre
pleinement à l’amour divin par ses propres forces. Il doit espérer que Dieu
lui donnera la capacité de l’aimer en retour et d’agir conformément aux
commandements de la charité. L’espérance est l’attente confiante de la
bénédiction divine et de la vision bienheureuse de Dieu ; elle est aussi
la crainte d’offenser l’amour de Dieu et de provoquer le châtiment.
2091
Le premier commandement vise aussi les péchés contre l’espérance, qui
sont le désespoir et la présomption :
Par le désespoir, l’homme cesse d’espérer de Dieu son salut personnel,
les secours pour y parvenir ou le pardon de ses péchés. Il s’oppose à la
Bonté de Dieu, à sa Justice – car le Seigneur est fidèle à ses promesses -,
et à sa Miséricorde.
2092
Il y deux sortes de présomption. Ou bien, l’homme présume de ses
capacités (espérant pouvoir se sauver sans l’aide d’en Haut), ou bien il
présume de la toute-puissance ou de la miséricorde divines (espérant obtenir
son pardon sans conversion et la gloire sans mérite).
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La charité.
2093
La foi dans l’amour de Dieu enveloppe l’appel et l’obligation de répondre à
la charité divine par un amour sincère. Le premier commandement nous ordonne
d’aimer Dieu par-dessus tout et toutes les créatures pour Lui et à cause de
Lui(1).
--------------------------------------
(1) cf. Deutéronome 6, 4-5.
2094
On peut pécher de diverses manières contre l’amour de Dieu : L’indifférence
néglige ou refuse la considération de la charité divine ; elle en
méconnaît la prévenance et en dénie la force. L’ingratitude omet ou
récuse de reconnaître la charité divine et de lui rendre en retour amour pour
amour. La tiédeur est une hésitation ou une négligence à répondre à
l’amour divin, elle peut impliquer le refus de se livrer au mouvement de la
charité. L’acédie ou paresse spirituelle va
jusqu’à refuser la joie qui vient de Dieu et à prendre en horreur le bien
divin. La haine de Dieu vient de l’orgueil. Elle s’oppose à l’amour de
Dieu dont elle nie la bonté et qu’elle prétend maudire comme celui qui
prohibe les péchés et qui inflige les peines.
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II. "C’est à lui seul que tu rendras un culte"
2095
Les vertus théologales de foi, d’espérance et de charité informent et
vivifient les vertus morales. Ainsi, la charité nous porte à rendre à Dieu ce
qu’en toute justice nous lui devons en tant que créatures. La vertu de
religion nous dispose à cette attitude.
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L’adoration.
2096
De la vertu de religion, l’adoration est l’acte premier. Adorer Dieu,
c’est le reconnaître comme Dieu, comme le Créateur et le Sauveur, le Seigneur
et le Maître de tout ce qui existe, l’Amour infini et miséricordieux.
"Tu adoreras le Seigneur ton Dieu, et c’est à lui seul que tu rendras un
culte"(1) dit Jésus, citant le Deutéronome 6, 13.
--------------------------------------
(1) Luc 4, 8.
2097
Adorer Dieu, c’est, dans le respect et la soumission absolue
reconnaître le "néant de la créature" qui n’est que par Dieu.
Adorer Dieu, c’est comme Marie, dans le Magnificat, le louer, l’exalter et
s’humilier soi-même, en confessant avec gratitude qu’Il a fait de grandes
choses et que saint est son nom(1). L’adoration du Dieu
unique libère l’homme du repliement sur soi-même, de l’esclavage du péché et
de l’idolâtrie du monde.
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(1) cf. Luc 1, 46-49.
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La prière.
2098
Les actes de foi, d’espérance et de charité que commande le premier
commandement s’accomplissent dans la prière. L’élévation de l’esprit vers
Dieu est une expression de notre adoration de Dieu : prière de louange
et d’action de grâce, d’intercession et de demande. La prière est une
condition indispensable pour pouvoir obéir aux commandements de Dieu.
"Il faut toujours prier sans jamais se lasser"(1).
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(1) Luc 18, 1.
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Le sacrifice.
2099
Il est juste d’offrir à Dieu des sacrifices en signe d’adoration et de
reconnaissance, de supplication et de communion : "Est un véritable
sacrifice toute action opérée pour adhérer à Dieu dans la sainte communion et
pouvoir être bienheureux"(1).
--------------------------------------
(1) Saint Augustin, De civitate Dei, 10, 6.
2100
Pour être véridique, le sacrifice extérieur doit être l’expression du
sacrifice spirituel : "Mon sacrifice, c’est un esprit brisé
..."(1). Les prophètes de l’Ancienne Alliance ont souvent
dénoncé les sacrifices faits sans participation intérieure(2) ou
sans lien avec l’amour du prochain(3). Jésus rappelle la parole
du prophète Osée : "C’est la miséricorde que je désire, et non le
sacrifice"(4). Le seul sacrifice parfait est celui que le Christ a
offert sur la croix en totale offrande à l’amour du Père et pour notre salut(5).
En nous unissant à son sacrifice nous pouvons faire de notre vie un sacrifice
à Dieu.
--------------------------------------
(1) Psaume 51, 19 – (2) cf. Amos 5, 21-25 – (3) cf. Isaïe 1, 10-20 – (4)
Matthieu 9, 13 ; 12, 7 ; cf. Osée 6, 6 – (5) cf. Hébreux 9, 13-14.
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Promesses et vœux.
2101
En plusieurs circonstances, le chrétien est appelé à faire des promesses
à Dieu. Le baptême et la confirmation, le mariage et l’ordination en
comportent toujours. Par dévotion personnelle, le chrétien peut aussi
promettre à Dieu tel acte, telle prière, telle aumône, tel pèlerinage, etc.
La fidélité aux promesses faites à Dieu est une manifestation du respect dû à
la Majesté divine et de l’amour envers le Dieu fidèle.
2102
"Le vœu, c’est-à-dire la promesse délibérée et libre faite à
Dieu d’un bien possible et meilleur doit être accompli au titre de la vertu
de religion"(1). Le vœu est un acte de dévotion dans lequel le
chrétien se voue lui-même à Dieu ou lui promet une œuvre bonne. Par
l’accomplissement de ses vœux, il rend donc à Dieu ce qui Lui a été promis et
consacré. Les Actes des Apôtres nous montrent saint Paul soucieux d’accomplir
les vœux qu’il a faits(2).
--------------------------------------
(1) Codex Juris Canonici, canon
1191, § 1 – (2) cf. Actes 18, 18 ; 21, 23-24.
2103
L’Église reconnaît une valeur exemplaire aux vœux de pratiquer les
conseils évangéliques(1) : L’Église notre Mère se réjouit de ce qu’il se
trouve dans son sein en grand nombre des hommes et des femmes pour vouloir
suivre de plus près et manifester plus clairement l’anéantissement du
Sauveur, en assumant, dans la liberté des fils de Dieu, la pauvreté et en
renonçant à leur propre volonté ; c’est-à-dire des hommes et des femmes
qui se soumettent en matière de perfection, au-delà de ce qu’exige le
commandement, à une créature humaine à cause de Dieu afin de se conformer
plus pleinement au Christ obéissant(2).
En certains cas, l’Église peut, pour des raisons proportionnées, dispenser
des vœux et des promesses(3).
--------------------------------------
(1) cf. Codex Juris Canonici, canon
654 – (2) Lumen gentium 42 – (3)
cf. Codex Juris Canonici, canon 692
; 1196-1197.
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Le devoir social de religion et le droit à la liberté religieuse.
2104
"Tous les hommes sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce
qui concerne Dieu et son Église ; et quand ils l’ont connue, de
l’embrasser et de lui être fidèles"(1). Ce devoir découle de
"la nature même des hommes"(2). Il ne contredit pas un
"respect sincère" pour les diverses religions qui "apportent
souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes"(3),
ni l’exigence de la charité qui presse les chrétiens "d’agir avec amour,
prudence, patience, envers ceux qui se trouvent dans l’erreur ou dans
l’ignorance de la foi"(4).
--------------------------------------
(1) Dignitatis humanae 1 – (2) Dignitatis humanae 2 – (3) Nostra aetate 2 –
(4) Dignitatis humanae 14.
2105
Le devoir de rendre à Dieu un culte authentique concerne l’homme
individuellement et socialement. C’est là "la doctrine catholique
traditionnelle sur le devoir moral des hommes et des sociétés à l’égard de la
vraie religion et de l’unique Église du Christ"(1).
En évangélisant sans cesse les hommes, l’Église travaille à ce qu’ils
puissent "pénétrer d’esprit chrétien les mentalités et les mœurs, les
lois et les structures de la communauté où ils vivent"(2).
Le devoir social des chrétiens est de respecter et d’éveiller en chaque homme
l’amour du vrai et du bien. Il leur demande de faire connaître le
culte de l’unique vraie religion qui subsiste dans l’Église catholique et
apostolique(3). Les chrétiens sont appelés à être la lumière du monde(4). L’Église
manifeste ainsi la royauté du Christ sur toute la création et en particulier
sur les sociétés humaines(5).
--------------------------------------
(1) Dignitatis humanae 1 – (2) Apostolicam actuositatem 10 – (3) cf. Dignitatis humanae 1 – (4) cf. Apostolicam actuositatem 13 – (5) cf. Immortale Dei ; Quas primas.
2106
"Qu’en matière religieuse, nul ne soit forcé d’agir contre sa
conscience, ni empêché d’agir, dans de justes limites, suivant sa conscience
en privé comme en public, seul ou associé à d’autres"(1).
Ce droit est fondé sur la nature même de la personne humaine dont la dignité
lui fait adhérer librement à vérité divine qui transcende l’ordre temporel.
C’est pourquoi il "persiste même en ceux-là qui ne satisfont pas à
l’obligation de chercher la vérité et d’y adhérer"(2).
--------------------------------------
(1) Dignitatis humanae 2 – (2) Dignitatis humanae 2.
2107
"Si, en raison des circonstances
particulières dans lesquelles se trouvent des peuples, une reconnaissance
civile spéciale est accordée dans l’ordre juridique de la cité à une société
religieuse donnée, il est nécessaire qu’en même temps, pour tous les citoyens
et toutes les communautés religieuses, le droit à la liberté en matière
religieuse soit reconnu et respecté"(1).
--------------------------------------
(1) Dignitatis humanae 6.
2108
Le droit à la liberté religieuse n’est ni la permission morale
d’adhérer à l’erreur(1), ni un droit supposé à l’erreur(2),
mais un droit naturel de la personne humaine à la liberté civile,
c’est-à-dire à l’immunité de contrainte extérieure, dans de justes limites,
en matière religieuse, de la part du pouvoir politique. Ce droit naturel doit
être reconnu dans l’ordre juridique de la société de telle manière qu’il
constitue un droit civil(3).
--------------------------------------
(1) cf. Libertas præstantissimum
– (2) cf. Pie XII, discours 6 décembre 1953 - officiel, en italien – traduction
française – (3)
cf. Dignitatis humanae 2.
2109
Le droit à la liberté religieuse ne peut être de soi ni illimité(1),
ni limité seulement par un "ordre public" conçu de manière
positiviste ou naturaliste(2). Les "justes limites" qui lui sont inhérentes
doivent être déterminées pour chaque situation sociale par la prudence
politique, selon les exigences du bien commun, et ratifiées par l’autorité
civile selon des "règles juridiques conformes à l’ordre moral
objectif"(3).
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(1) cf. Pie VI, bref Quod aliquantum –
(2) cf. Pie IX, encyclique Quanta cura – (3) Dignitatis humanae 7.
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III. "Tu n’auras pas d’autres dieux devant
moi".
2110
Le premier commandement interdit d’honorer d’autres dieux que l’Unique
Seigneur qui s’est révélé à son peuple. Il proscrit la superstition et
l’irréligion. La superstition représente en quelque sorte un excès pervers de
religion ; l’irréligion est un vice opposé par défaut à la vertu de
religion.
La superstition.
2111
La superstition est la déviation du sentiment religieux et des
pratiques qu’il impose. Elle peut affecter aussi le culte que nous rendons au
vrai Dieu, par exemple, lorsqu’on attribue une importance en quelque sorte
magique à certaines pratiques, par ailleurs légitimes ou nécessaires.
Attacher à la seule matérialité des prières ou des signes sacramentels leur
efficacité, en dehors de dispositions intérieures qu’ils exigent, c’est
tomber dans la superstition(1).
--------------------------------------
(1) cf. Matthieu 23, 16-22.
L’idolâtrie.
2112
Le premier commandement condamne le polythéisme. Il exige de
l’homme de ne pas croire en d’autres dieux que Dieu, de ne pas vénérer
d’autres divinités que l’Unique. L’Écriture rappelle constamment ce rejet des
"idoles, or et argent, œuvres de mains d’hommes", elles qui
"ont une bouche et ne parlent pas, des yeux et ne voient pas ...".
Ces idoles vaines rendent vain : "Comme elles, seront ceux qui les
firent, quiconque met en elles sa foi"(1). Dieu, au
contraire, est le "Dieu vivant"(2), qui fait vivre et
intervient dans l’histoire.
--------------------------------------
(1) Psaume 115, 4-5. 8 ; cf. Isaïe 44, 9-20 ; Jérémie 10, 1-16 ; Daniel 14,
1-30 ; Baruch 6 ; Sagesse 13, 1 – 15, 19 – (2) Josué 3, 10 ; Psaume 42, 3 ; etc.
2113
L’idolâtrie ne concerne pas seulement les faux cultes du paganisme.
Elle reste une tentation constante de la foi. Elle consiste à diviniser ce
qui n’est pas Dieu. Il y a idolâtrie dès lors que l’homme honore et révère
une créature à la place de Dieu, qu’il s’agisse des dieux ou des démons (par
exemple le satanisme), de pouvoir, de plaisir, de la race, des ancêtres, de
l’Etat, de l’argent, etc. "Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon",
dit Jésus(1). De nombreux martyrs sont morts pour ne pas adorer
"la Bête"(2), en refusant même d’en simuler le culte. L’idolâtrie
récuse l’unique Seigneurie de Dieu ; elle est donc incompatible avec la
communion divine(3).
--------------------------------------
(1) Matthieu 6, 24 – (2) cf. Apocalypse 13-14 – (3) cf. Galates 5, 20 ;
Éphésiens 5, 5.
2114
La vie humaine s’unifie dans l’adoration de l’Unique. Le commandement
d’adorer le seul Seigneur simplifie l’homme et le sauve d’une dispersion
infinie. L’idolâtrie est une perversion du sens religieux inné de l’homme.
L’idolâtre est celui qui "rapporte à n’importe quoi plutôt qu’à Dieu son
indestructible notion de Dieu"(1).
--------------------------------------
(1) Origène, Contre Celse, 2, 40.
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Divination et magie.
2115
Dieu peut révéler l’avenir à ses prophètes ou à d’autres saints.
Cependant l’attitude chrétienne juste consiste à s’en remettre avec confiance
entre les mains de la Providence pour ce qui concerne le futur et à
abandonner toute curiosité malsaine à ce propos. L’imprévoyance peut
constituer un manque de responsabilité.
2116
Toutes les formes de divination sont à rejeter : recours à
Satan ou aux démons, évocation des morts ou autres pratiques supposées à tort
"dévoiler" l’avenir(1). La consultation des horoscopes, l’astrologie, la
chiromancie, l’interprétation des présages et des sorts, les phénomènes de
voyance, le recours aux médiums recèlent une volonté de puissance sur le
temps, sur l’histoire et finalement sur les hommes en même temps qu’un désir
de se concilier les puissances cachées. Elles sont en contradiction avec
l’honneur et le respect, mêlé de crainte aimante, que nous devons à Dieu
seul.
--------------------------------------
(1) cf. Deutéronome 18, 10 ; Jérémie 29, 8.
2117
Toutes les pratiques de magie ou de sorcellerie par
lesquelles on prétend domestiquer les puissances occultes pour les mettre à
son service et obtenir un pouvoir surnaturel sur le prochain, – fût-ce pour
lui procurer la santé -, sont gravement contraires à la vertu de religion.
Ces pratiques sont plus condamnables encore quant elles s’accompagnent d’une
intention de nuire à autrui ou qu’elles recourent ou non à l’intervention des
démons. Le port des amulettes est lui aussi répréhensible. Le spiritisme
implique souvent des pratiques divinatoires ou magiques. Aussi l’Église
avertit-elle les fidèles de s’en garder. Le recours aux médecines dites
traditionnelles ne légitime ni l’invocation des puissances mauvaises, ni
l’exploitation de la crédulité d’autrui.
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L’irréligion.
2118
Le premier commandement de Dieu réprouve les principaux péchés
d’irréligion : l’action de tenter Dieu, en paroles ou en actes, le
sacrilège et la simonie.
2119
L’action de tenter Dieu consiste en une mise à l’épreuve, en
parole ou en acte, de sa bonté et de sa toute-puissance. C’est ainsi que
Satan voulait obtenir de Jésus qu’il se jette du Temple et force Dieu, par ce
geste, à agir(1). Jésus lui oppose la parole de Dieu : "Tu ne
tenteras pas le Seigneur, ton Dieu"(2). Le défi que contient
pareille tentation de Dieu blesse le respect et la confiance que nous devons
à notre Créateur et Seigneur. Il inclut toujours un doute concernant son
amour, sa providence et sa puissance (3).
--------------------------------------
(1) cf. Luc 4, 9 – (2) Deutéronome 6, 16 – (3) cf. 1 Corinthiens 10, 9 ;
Exode 17, 2-7 ; Psaume 95, 9.
2120
Le sacrilège consiste à profaner ou à traiter indignement les
sacrements et les autres actions liturgiques, ainsi que les personnes, les
choses et les lieux consacrés à Dieu. Le sacrilège est un péché grave surtout
quand il est commis contre l’Eucharistie puisque, dans ce sacrement, le Corps
même du Christ nous est rendu présent substantiellement(1).
--------------------------------------
(1) cf. Codex Juris Canonici, canon
1367 ; 1376.
2121
La simonie(1) se définit comme l’achat ou la vente des réalités
spirituelles. À Simon le magicien, qui voulait acheter le pouvoir spirituel
qu’il voyait à l’œuvre dans les apôtres, Pierre répond : "Périsse
ton argent, et toi avec lui, puisque tu as cru acheter le don de Dieu à prix
d’argent"(2). Il se conformait ainsi à la parole de Jésus :
"Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement"(3).
Il est impossible de s’approprier les biens spirituels et de se comporter à
leur égard comme un possesseur ou un maître, puisqu’ils ont leur source en
Dieu. On ne peut que les recevoir gratuitement de Lui.
--------------------------------------
(1) cf. Actes 8, 9-24 – (2) Actes 8, 20 – (3) Matthieu 10, 8 ; cf. déjà Isaïe
55, 1.
2122
"En dehors des offrandes fixées par
l’autorité compétente, le ministre ne demandera rien pour l’administration
des sacrements, en veillant toujours à ce que les nécessiteux ne soient pas
privés de l’aide des sacrements à cause de leur pauvreté"(1).
L’autorité compétente fixe ces "offrandes" en vertu du principe que
le peuple chrétien doit subvenir à l’entretien des ministres de l’Église.
"L’ouvrier mérite sa nourriture"(2).
--------------------------------------
(1) Codex Juris Canonici, canon 848 – (2) Matthieu 10, 10 ; cf. Luc 10, 7 ; 1
Corinthiens 9, 5-18 ; 1 Timothée 5, 17-18.
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L’athéisme.
2123
"Beaucoup de nos contemporains ne perçoivent pas du tout ou même
rejettent explicitement le rapport intime et vital qui unit l’homme à
Dieu : à tel point que l’athéisme compte parmi les faits les plus graves
de ce temps"(1).
--------------------------------------
(1) Gaudium et spes 19, § 1.
2124
Le nom d’athéisme recouvre des phénomènes très divers. Une forme
fréquente en est le matérialisme pratique qui borne ses besoins et ses
ambitions à l’espace et au temps. L’humanisme athée considère faussement que
l’homme "est pour lui-même sa propre fin, le seul artisan et le démiurge
de son histoire"(1). Une autre forme de l’athéisme contemporain attend la
libération de l’homme d’une libération économique et sociale à laquelle
"s’opposerait par sa nature même, la religion, dans la mesure où
érigeant l’espérance de l’homme sur le mirage d’une vie future, elle le
détournerait d’édifier la cité terrestre"(2).
--------------------------------------
(1) Gaudium et spes 20, § 1 – (2) Gaudium et spes 20, § 2.
2125
En tant qu’il rejette ou refuse l’existence de Dieu, l’athéisme est
un péché contre la vertu de religion(1). L’imputabilité de cette
faute peut être largement diminuée en vertu des intentions et des
circonstances. Dans la genèse et la diffusion de l’athéisme, "les croyants
peuvent avoir une part qui n’est pas mince, dans la mesure où, par la
négligence dans l’éducation de la foi, par des représentations trompeuses de
la doctrine, et aussi par des défaillances de leur vie religieuse, morale et
sociale, on peut dire qu’ils voilent l’authentique visage de Dieu et de la
religion plus qu’ils ne le révèlent"(2).
--------------------------------------
(1) cf. Romains 1, 18 – (2) Gaudium et
spes 19, § 3.
2126
Souvent l’athéisme se fonde sur une conception fausse de l’autonomie
humaine, poussée jusqu’au refus de toute dépendance à l’égard de Dieu(1).
Pourtant, "la reconnaissance de Dieu ne s’oppose en aucune façon à la
dignité de l’homme, puisque cette dignité trouve en Dieu lui-même ce qui la
fonde et ce qui l’achève"(2). L’Église sait "que son message est en accord avec
le fond secret du cœur humain"(3).
--------------------------------------
(1) cf. Gaudium et spes 20, § 1 – (2) Gaudium et spes 21, § 3 – (3) Gaudium
et spes 21, § 7.
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L’agnosticisme.
2127
L’agnosticisme revêt plusieurs formes. Dans certains cas,
l’agnostique se refuse à nier Dieu ; il postule au contraire l’existence
d’un être transcendant qui ne pourrait se révéler et dont personne ne saurait
rien dire. Dans d’autres cas, l’agnostique ne se prononce pas sur l’existence
de Dieu, déclarant qu’il est impossible de la prouver et même de l’affirmer
ou de la nier.
2128
L’agnosticisme peut parfois contenir une certaine recherche de Dieu,
mais il peut également représenter un indifférentisme, une fuite devant la
question ultime de l’existence, et une paresse de la conscience morale.
L’agnosticisme équivaut trop souvent à un athéisme pratique.
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IV. "Tu ne
te feras aucune image sculptée...".
2129
L’injonction divine comportait l’interdiction de toute représentation de Dieu
par la main de l’homme. Le Deutéronome explique : "Puisque vous
n’avez vu aucune forme, le jour où le Seigneur, à l’Horeb, vous a parlé du
milieu du feu, n’allez pas vous pervertir et vous faire une image sculptée
représentant quoi que ce soit ..."(1). C’est le Dieu absolument
Transcendant qui s’est révélé à Israël. "Il est toutes choses",
mais en même temps, "Il est au-dessus de toutes ses œuvres"(2).
Il est "la source même de toute beauté créée"(3).
--------------------------------------
(1) Deutéronome 4, 15-16 – (2) Siracide (Ben Sirac) 43, 27-28 – (3) Sagesse
13, 3.
2130
Cependant dès l’Ancien Testament, Dieu a ordonné ou permis
l’institution d’images qui conduiraient symboliquement au salut par le Verbe
incarné : ainsi le serpent d’airain(1), l’arche d’Alliance et
les chérubins(2).
--------------------------------------
(1) cf. Nombres 21, 4-9 ; Sagesse 16, 5-14 ; Jean 3, 14-15 – (2) cf. Exode
25, 10-22 ; 1 Rois 6, 23-28 ; 7, 23-26.
2131
C’est en se fondant sur le mystère du Verbe incarné que le septième
Concile œcuménique, à Nicée (en 787), a justifié, contre les iconoclastes, le
culte des icônes : celles du Christ, mais aussi celles de la Mère de
Dieu, des anges et de tous les saints. En s’incarnant, le Fils de Dieu a
inauguré une nouvelle "économie(1)" des images.
--------------------------------------
(1) Économie = organisation des parties d'un ensemble, structure.
2132
Le culte chrétien des images n’est pas contraire au premier
commandement qui proscrit les idoles. En effet, "l’honneur rendu à une
image remonte au modèle original"(1), et "quiconque
vénère une image, vénère en elle la personne qui y est dépeinte"(2).
L’honneur rendu aux saintes images est une "vénération
respectueuse", non une adoration qui ne convient qu’à Dieu seul :
Le culte de la religion ne s’adresse pas aux images en elles-mêmes comme des
réalités, mais les regarde sous leur aspect propre d’images qui nous
conduisent à Dieu incarné. Or le mouvement qui s’adresse à l’image en tant
que telle ne s’arrête pas à elle, mais tend à la réalité dont elle est
l’image(3).
--------------------------------------
(1) Saint Basile de Césarée en Cappadoce (saint Basile le grand), Traité du Saint-Esprit, 18, 45 – (2)
Concile de Nicée II (Denzinger-Schönmetzer 601) ; cf. Concile de Trente
(Denzinger-Schönmetzer 1821-1825) ; Concile de Vatican II (Sacrosanctum concilium 126 ; Lumen gentium 67 – (3) Saint Thomas
d’Aquin, Somme théologique, 2-2, 81, 3, ad 3.
En bref
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2133
"Tu aimeras le Seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et
de toutes tes forces" (Deutéronome 5, 6).
2134
Le premier commandement appelle l’homme à croire en Dieu, à espérer en
Lui et à L’aimer par-dessus tout.
2135
"C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras" (Matthieu 4, 10).
Adorer Dieu, Le prier, Lui offrir le culte qui Lui revient, accomplir les
promesses et les vœux qu’on Lui a faits, sont des actes de la vertu de
religion qui relèvent de l’obéissance au premier commandement.
2136
Le devoir de rendre à Dieu un culte authentique concerne l’homme
individuellement et socialement.
2137
L’homme "doit pouvoir professer librement la religion en privé et en
public" (Dignitatis humanae 15).
2138
La superstition est une déviation du culte que nous rendons au vrai Dieu.
Elle éclate dans l’idolâtrie, ainsi que dans les différentes formes de
divination et de magie.
2139
L’action de tenter Dieu, en paroles ou en actes, le sacrilège, la simonie
sont des péchés d’irréligion interdits par le premier commandement.
2140
En tant qu’il rejette ou refuse l’existence de Dieu, l’athéisme est un
péché contre le premier commandement.
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