Vision du samedi 20
octobre 1945
548> Jésus, avec
Simon le Zélote et Margziam,
traverse Nazareth en se dirigeant vers la campagne qui s'étend vers Cana. Et
il la traverse, sa ville, incrédule et hostile, en prenant justement les rues
les plus centrales et en coupant de biais la place du marché, fréquentée à
cette heure matinale. Plusieurs se retournent pour le regarder :
quelques rares habitants le saluent, les femmes, surtout les plus âgées, Lui
sourient mais, à part quelques enfants, personne ne vient à Lui.
549> Un murmure le suit quand il
est passé. Jésus voit certainement tout, mais ne le manifeste pas. Il parle
avec Simon ou avec l'enfant, qui est entre les deux hommes, et il suit son
chemin.
Ils sont maintenant aux dernières maisons. Sur le seuil d'une porte se
trouve. Il semble qu'elle attende quelqu'un. Quand elle voit Jésus, elle est
sur le point d'avancer, puis elle s'arrête et baisse la tête en rougissant.
"C'est une parente, c'est l'épouse de Simon d'Alphée"
dit Jésus à l'apôtre.
La femme parait sur les épines, en proie à des sentiments opposés. Elle
change de couleur, lève les yeux et les abaisse. Tout son visage exprime un
désir de parler que quelque motif retient.
"La paix à toi, Salomé"
lui dit pour la saluer Jésus qui est à sa hauteur.
La femme le regarde comme étonnée par le ton affectueux de son Parent, et
elle répond, en rougissant encore davantage : "La paix à..."
L'envie de pleurer l'empêche de finir la phrase, Elle couvre son visage en
repliant son bras et elle pleure angoissée, contre l'huisserie de la porte de
la maison.
"Pourquoi pleures-tu ainsi, Salomé ? Ne puis-je rien faire pour te
consoler ? Viens ici, dans ce coin, et dis-moi ce que tu as..." et
il la prend par le coude et la conduit dans une petite ruelle entre sa maison
et le jardin d'une autre maison. Simon avec Margziam, tout étonné, restent à
l'entrée de la ruelle.
"Qu'as-tu, Salomé ? Tu sais que je t'aime bien, que je vous ai
toujours bien aimés. Tous. Et qu'il en est toujours ainsi. Tu dois y
croire et pour ce motif avoir confiance..."
Les pleurs s'arrêtent comme pour écouter ces paroles et en comprendre le vrai
sens, et puis reprennent plus forts, alternant avec des paroles
décousues : "Toi oui… Nous... Pas moi, pourtant... Et pas même
Simon... Mais lui est plus sot que moi... Moi, je lui disais... "Appelle
Jésus"... Mais tout le pays est contre nous... contre Toi... contre
moi... contre mon enfant..." Arrivé au point tragique, les pleurs
deviennent à leur tour tragiques. La femme se tord
et gémit en se frappant le visage comme si la douleur la faisait délirer.
Jésus lui prend les mains en disant : "Non pas ainsi. Je suis ici
pour te consoler. Parle et Moi, je ferai tout..."
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550> La femme le regarde en écarquillant les yeux par
l'étonnement et la souffrance. Mais l'espoir lui donne la force de parler, et
elle parle posément : "Même si Simon est coupable, auras-tu pitié
de moi ? Vraiment ? ...Oh ! Jésus qui sauves
tout le monde ! Mon petit ! Alphée, le
dernier, il est malade... il meurt !... Tu l'aimais, Alphée. Tu lui
découpais des jouets dans le bois... Tu le soulevais pour qu'il cueille le
raisin et les figues de tes arbres... et avant de partir pour ...pour aller
dans le monde, tu lui enseignais déjà tant de bonnes choses... Maintenant, tu
ne pourrais plus... Il est comme mort... Il ne mangera plus de raisin ni de
figues. Il n'apprendra plus rien..." et elle pleure à chaudes larmes.
"Salomé, sois bonne. Dis-moi ce qu'il
a."
"Son ventre est très malade. Il a crié, éprouvé des spasmes, déliré
pendant tant de jours. Maintenant il ne parle plus. Il est comme quelqu'un
que l'on a frappé à la tête. Il gémit, mais ne répond pas. Il ne sait même
pas qu'il gémit. Il est livide. Déjà il se refroidit. Et il y a tant de jours
que je supplie Simon d'aller te trouver. Mais... Oh ! je l'ai toujours
aimé, mais à présent je le hais car c'est un sot qui pour une idée stupide
fait mourir mon enfant. Mais lui mort, je m'en irai, dans ma maison avec mes
autres enfants. Il n'est pas capable d'être père quand il le faut. Et moi, je
défends mes enfants. Je m'en vais. Oui. Que le monde dise ce qu'il veut. Je
m'en vais."
"Ne parle pas ainsi. Renonce tout de suite à cette pensée de
vengeance."
"De justice. Je me révolte, tu le vois ? Moi, je t'ai attendu parce
que personne ne te disait : "Viens". Moi, je te le dis. Mais
j'ai dû le faire comme si c'était une mauvaise action, et je ne puis te
dire : "Entre" car dans la maison, il y a les gens de Joseph
et..."
"Il n'est pas nécessaire. Me promets-tu de pardonner à Simon ?
D'être toujours bonne épouse ? Si tu me le promets Moi, je te dis :
"Rentre chez toi, et ton fils guéri te sourira". Peux-tu le
croire ?"
"Moi, je crois en Toi. Même contre tout le monde, je crois."
"Et comme tu as la foi, peux-tu avoir le pardon ?"
"...Vas-tu vraiment me le guérir ?"
"Non seulement cela. Je te promets que cessera le doute de Simon sur
Moi, et le petit Alphée, et avec lui les autres enfants, et toi avec ton
époux, leur père, vous reviendrez dans ma maison. Marie dit si souvent ton
nom..."
"Oh ! Marie, Marie ! Il est né quand elle était là, Alphée...
Oui, Jésus, je pardonnerai. Je ne lui dirai rien... Non, plutôt je lui
dirai : "Voici comme Jésus répond à ta manière d'agir : en te
rendant un fils". Cela, je peux le dire !"
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551> "Tu peux le dire... Va,
Salomé. Va ! Ne pleure plus. Adieu. La paix à toi, bonne Salomé. Va,
Va !" Il la ramène à la porte, la regarde entrer, sourit en voyant
que toute anxieuse elle court vers l'entrée sans même fermer la porte, et Lui
s'approche lentement pour la fermer complètement.
Il se tourne vers ses deux compagnons et il dit : "Et maintenant
allons où nous devions aller..."
"Crois-tu que Simon se convertira ?" demande le Zélote.
"Ce n'est pas un infidèle. C'est seulement quelqu'un qui se laisse
dominer par le plus fort."
"Oh! mais alors! Plus fort que le miracle !"
"Tu vois que tu te réponds par toi-même... Je suis content d'avoir sauvé
l'enfant. Je l'ai vu quand il avait quelques heures et il m'a toujours bien
aimé..."
"Comme moi? Et il deviendra disciple ?" demande Margziam
intéressé et qui a du mal à croire que quelqu'un puisse aimer Jésus comme il
l'aime.
"Toi, tu m'aimes comme enfant et comme disciple. Alphée m'aimait seulement
comme enfant, Mais après, il m'aimera aussi comme disciple. Mais maintenant
il est encore enfant. Il a huit ans environ. Tu le verras."
"Alors, comme enfant et disciple, il n'y a que moi ?"
"Toi seul, pour l'instant. Tu es le chef des enfants disciples. Quand tu
seras tout à fait homme, rappelle-toi que tu as su être un disciple qui n'est
pas inférieur aux hommes, et par conséquent ouvre les bras à tous les enfants
qui viendront à toi en me cher- chant et en disant: " Je veux être
disciple du Christ". Le feras-tu ?"
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