"L'Évangile tel qu'il m'a été
révélé" |
aucun accent |
||
Mercredi 19 septembre 29
- Arrivée à
Béthanie et à la maison de Lazare 158 - Les deux
sœurs désirent la guérison de Lazare 159 - Avoir
confiance comme Lazare 160 - Lazare
offre sa protection et se résigne 161 - Les juifs
cherchent toujours Jésus 163 - Judas
propose un plan que Jésus accepte 163 |
Accueil >> Plan du site >> Sommaire du Tome 7 7.180. |
||
158> Les verts de toutes nuances des campagnes
qui entourent Béthanie se présentent à la vue dès que l'on a franchi le
sommet de la colline et que l'on pose le pied sur son versant sud, qui
descend par une route en zigzag vers Béthanie. Le vert argenté des oliviers,
le vert bien marqué des pommiers, parsemé ici et là par les premières
feuilles jaunes, le vert rare et plus jaunâtre des vignes, le vert foncé et
compact des chênes et des caroubiers, mêlés au marron des champs déjà
labourés et qui attendent la semence et au vert tendre des prés où pousse une
herbe nouvelle et des jardins fertiles, forment une sorte de tapis
multicolore pour celui qui d'en haut domine Béthanie et ses alentours. Et, se
détachant sur le vert, plus en bas, les pinceaux des palmiers dattiers
toujours élégants et qui rappellent l'Orient. La petite ville d'Ensémès, groupée au milieu
de la verdure et illuminée par le soleil qui va bientôt se coucher, est bien
vite franchie et aussi la source abondante qui est un peu au nord de
l'endroit où commence Béthanie, et puis voilà les premières maisons dans la
verdure... 159> Ils sont arrivés après tant de chemin, de
chemin fatigant et, malgré leur fatigue extrême, ils semblent reprendre des
forces rien que par la proximité de la maison amie de Béthanie. La petite ville est tranquille, presque vide. Beaucoup
d'habitants doivent être déjà à Jérusalem pour la fête. Aussi, Jésus passe inaperçu
jusque dans le voisinage de la maison de Lazare. C'est seulement quand il est
près du jardin en friche de la maison, où il y avait tant d'échassiers, qu'il rencontre
deux hommes. Ils le reconnaissent et le saluent et puis Lui demandent :
"Tu vas chez Lazare, Maître ? Tu fais bien. Il est si malade. Nous en venons
après lui avoir apporté le lait de nos ânesses, la seule nourriture que son
estomac digère encore avec un peu de jus de fruits et de miel. Les deux sœurs
ne font que pleurer, épuisées par les veilles et la douleur... Et lui ne fait
que te désirer. Je crois qu'il serait déjà mort, mais l'anxiété de te revoir
l'a fait vivre jusqu'ici." "J'y vais tout de suite. Dieu soit avec vous." "Et... tu le guériras ?" demandent-ils curieux. "La volonté de Dieu se manifestera sur lui, et avec elle
la puissance du Seigneur" répond Jésus en quittant les deux, perplexes,
et il se hâte vers le portail du jardin. Un serviteur le voit et court Lui ouvrir, mais sans aucun cri
de joie. Sitôt le portail ouvert, il s'agenouille pour vénérer Jésus, et il
dit d'une voix attristée : "Tu tombes bien, ô Seigneur ! Et veuille ta
venue être un signe de joie pour cette maison éplorée. Lazare, mon
maître..." "Je le sais. Soyez tous résignés à la volonté du Seigneur.
Il récompensera le sacrifice de votre volonté à la sienne. Va et appelle Marthe et Marie. Je les attends dans
le jardin." Le serviteur s'éloigne en courant et Jésus le suit lentement
après avoir dit à ses apôtres: "Je vais près de Lazare. Reposez-vous car
vous en avez besoin..." Les deux sœurs se présentent sur le seuil, et elles ont du mal
à reconnaître le Seigneur tant leurs yeux sont fatigués par les veilles et
les larmes, et le soleil qui les frappe en face augmente la difficulté
qu'elles éprouvent pour le voir. Pendant ce temps, d'autres serviteurs sortent
par une porte secondaire à la rencontre des apôtres pour les emmener avec
eux. "Marthe ! Marie ! C'est Moi. Vous ne me reconnaissez pas
?" "Oh ! le Maître !" s'écrient les deux sœurs, et elles
se mettent à courir vers Lui, se jetant à ses pieds, et étouffant
difficilement leurs sanglots. Baisers et larmes tombent sur les pieds de
Jésus comme autrefois dans
la maison de Simon le pharisien. 160> Mais cette fois Jésus ne reste pas raide
comme alors pour recevoir la pluie de larmes de Marthe et de Marie.
Maintenant il se penche et il touche leurs têtes, les caresse et les bénit
par ce geste et les force à se lever, en disant: "Venez. Allons sous la
tonnelle des jasmins. Pouvez-vous quitter Lazare ?" Plus par signes que par paroles, tout en sanglots, elles disent
que oui. Et ils vont sous le pavillon ombragé, sous le feuillage fourni et
sombre duquel quelque tenace étoile de jasmin blanchit et exhale son parfum. "Parlez donc...." "Oh ! Maître ! Tu viens dans une maison bien triste ! Nous
sommes abêties par la douleur. Quand le serviteur nous a dit : "II y a
quelqu'un qui vous cherche" nous n'avons pas pensé à Toi. Quand nous
t'avons vu, nous ne t'avons pas reconnu. Mais tu vois ? Nos yeux sont brûlés
par les larmes. Lazare se meurt !..." et les pleurs reprennent
interrompant les paroles des deux sœurs qui ont parlé alternativement. "Et je suis venu..." "Pour le guérir ?! Oh ! mon Seigneur !" dit Marie
rayonnante d'espoir à travers ses larmes. "Oh ! Moi, je le disais ! Si le Maître vient..."dit
Marthe en joignant les mains en un geste de joie. "Oh ! Marthe ! Marthe ! Que sais-tu des opérations et des
décrets de Dieu ?" "Hélas, Maître ! Tu ne vas pas le guérir ?!"
s'écrient-elles ensemble en retombant dans leur peine. "Je vous dis : ayez une foi sans bornes dans le Seigneur.
Continuez de l'avoir malgré toute insinuation et tout événement, et vous
verrez de grandes choses quand votre cœur n'aura plus de raison d'espérer les
voir. Que dit Lazare ?"
161> "Viens, Seigneur. Toute minute qui
passe est dérobée à l'espoir de Lazare. Il comptait les heures... Il disait :
"Et pourtant, pour la fête, il sera à Jérusalem et il viendra..." Nous,
nous qui savons beaucoup de choses que nous ne disons pas à Lazare pour ne
pas le faire souffrir, nous avions moins d'espoir, car nous pensions que tu
ne viendrais pas pour échapper à ceux qui te cherchent... C'était ce que
pensait Marthe. "Tu n'as peur de rien, Marie ?" demande Jésus. "Du péché... et de moi-même... J'ai toujours peur de
retomber dans le mal. Je pense que Satan doit me haïr beaucoup." "Tu as raison. Tu es une des âmes que Satan hait le plus,
mais tu es aussi une des plus aimées de Dieu. Souviens-toi de cela." "Oh ! je m'en souviens. C'est ma force ce souvenir ! Je me
rappelle ce que tu as dit dans la maison de Simon. Tu as dit : "II lui
est beaucoup pardonné, parce qu'elle a beaucoup aimé", et à moi :
"Les péchés te sont pardonnés. Ta foi t'a sauvée. Va en paix". Tu
as dit : "les péchés". Non pas plusieurs, tous. Et alors je pense
que tu m'as aimée, ô mon Dieu, sans mesure. Or, si ma pauvre foi d'alors,
telle qu'elle pouvait surgir dans une âme appesantie par les fautes, a tant
obtenu de Toi, ma foi de maintenant ne pourra-t-elle pas me défendre du Mal ?" "Oui, Marie. Veille et surveille toi-même. C'est humilité
et prudence. Mais aie foi dans le Seigneur. Il est avec toi." Ils entrent dans la maison. Marthe va trouver son frère. Marie
voudrait servir Jésus, mais il veut d'abord aller voir Lazare. Ils entrent dans
la pièce dans la pénombre, où se consomme le sacrifice. "Maître !" "Mon ami !" Les bras squelettiques de Lazare se tendent vers le haut, ceux
de Jésus se penchent pour embrasser le corps de l'ami languissant. Un long
embrassement. Puis Jésus recouche le malade sur les oreillers et le contemple
avec pitié. Mais Lazare sourit. Il est heureux. Dans son visage ravagé, ne
resplendissent vivants que les yeux enfoncés, mais rendus lumineux par la
joie d'avoir là Jésus. "Tu vois ? Je suis venu, et pour rester beaucoup avec
toi." "Oh ! tu ne peux Seigneur. À moi, on ne
dit pas tout, mais j'en sais assez pour te dire que tu ne le peux. 162> À la douleur qu'ils
te donnent, ils ajoutent la mienne, ma part, en ne me laissant pas expirer
dans tes bras. Mais moi qui t'aime, je ne puis par égoïsme te retenir près de
moi, en danger. Pour Toi... j'ai déjà pourvu... Tu dois changer d'endroit
sans cesse. Toutes mes maisons te sont ouvertes. Les gardiens ont des ordres
et de même les intendants de mes champs. Mais ne va pas séjourner au
Gethsémani, l'endroit est très surveillé. Je parle de la maison. Car dans les
oliviers, surtout ceux du haut, tu peux y aller et par plusieurs chemins,
sans qu'ils le sachent. Margziam, tu sais qu'il est déjà ici ? Margziam a été
interrogé par certains alors qu'il était dans le pressoir avec Marc. Ils
voulaient savoir où tu étais, si tu venais. L'enfant a très bien répondu:
"Il est Israélite et il viendra. Par où, je ne sais pas, l'ayant quitté
au Méron". Ainsi il les
a empêchés de te dire pécheur et il n'a pas menti." "Je te remercie, Lazare. Je t'écouterai, mais nous nous
verrons souvent tout de même". Il le contemple encore. "Tu me regardes, Maître ? Tu vois à quel point je suis
réduit ? Comme un arbre qui se dépouille de ses feuilles à l'automne, je me
dépouille d'heure en heure de chair, de forces et d'heures de vie. Mais je
dis la vérité quand je dis que, si je regrette de ne pas vivre assez pour
voir ton triomphe, je suis heureux de m'en aller pour ne pas voir, impuissant
comme je le suis pour la freiner, la haine qui grandit autour de Toi." "Tu n'es pas impuissant; tu ne l'es jamais. Tu pourvois
aux besoins de ton Ami, dès avant qu'il n'arrive. J'ai deux maisons de paix,
et je pourrais dire également chères : celle de Nazareth, et celle-ci. Si
là-bas se trouve ma Mère, l'amour céleste pour ainsi dire aussi grand
que le Ciel pour le Fils de Dieu, ici j'ai l'amour des hommes pour le Fils de
l'homme, l'amour amical, plein de foi et de vénération... Merci, mes
amis!" "Ta Mère ne viendra jamais ?" "Au début du printemps." "Oh ! alors, je ne la verrai plus..." "Si. Tu la verras. C'est Moi qui te le dis. Tu dois me
croire." "Je crois à tout, Seigneur, même à ce que les faits
démentent". "Margziam, où est-il ?" "A Jérusalem avec les disciples, mais il vient ici le
soir, d'ici peu, désormais. Et tes apôtres, ils ne sont pas avec Toi ?" "Ils sont à côté avec Maximin qui vient au secours de leur fatigue et de
leur épuisement." "Vous avez beaucoup marché ?" 163> "Beaucoup, sans arrêt. Je te raconterai...
Pour l'instant, repose-toi. Je te bénis pour maintenant." Et Jésus le
bénit et se retire. Les apôtres sont maintenant avec Margziam et avec presque tous
les bergers, et ils parlent de l'insistance des pharisiens pour savoir
quelque chose de Jésus. Ils disent que cela a éveillé leurs soupçons, de
sorte que leurs disciples ont pensé à se mettre de garde sur toutes les
routes qui conduisent à l'intérieur de Jérusalem pour avertir le Maître. "En effet, rapporte Isaac, nous sommes disséminés sur toutes les
routes à quelques stades des Portes, et à tour de rôle nous passons une nuit
ici. C'est notre tour." "Maître, dit en riant Judas, ils disent qu'à la porte de Jaffa il y
avait la moitié du Sanhédrin. Ils se disputaient entre eux, car certains
rappelaient mes paroles d'Engannim; [1] d'autres juraient
avoir appris que tu avais été à Dothaïn; d'autres, au
contraire, disaient qu'il t'avaient vu près d'Éphraïm, et cela les rendait furieux de ne pas
savoir où tu étais..." et il rit de la farce qu'il a jouée aux ennemis
de Jésus. "Demain ils me verront." "Non, demain, c'est nous qui y allons. C'est déjà convenu
: tous en groupe, et en nous mettant bien en vue." "Je ne veux pas. Tu mentirais." "Je te jure que je ne mentirai pas. S'ils ne me disent
rien, je ne leur dis rien. S'ils nous demandent si tu es avec nous, je dirai
: "Et ne voyez-vous pas qu'il n'y est pas ?", et s'ils veulent
savoir où tu es, je répondrai: "Cherchez-le, vous. Comment voulez-vous
que je sache où est le Maître, en ce
moment ?" En effet, je ne pourrais certes pas savoir si tu es à la
maison, ici, ou dans les vergers, ou bien je ne sais où." "Judas, Judas, je t'ai dit..." "Et moi, je te dis que tu as raison.
Mais ce ne sera pas toujours de ma part simplicité de colombe, mais prudence
de serpent. Toi la colombe, moi le serpent. Et ensemble nous formerons cette
perfection que tu as enseignée". Il prend le ton qu'a Jésus quand il
instruit, et il dit, en imitant le Maître à la perfection : "Je vous envoie
comme des brebis parmi des loups. Soyez donc prudents comme les serpents et
simples comme les colombes... Ne vous préoccupez pas comment répondre, car à
ce moment-là vous seront mises sur les lèvres les paroles car ce n'est pas
vous qui parlez, mais l'Esprit qui parle en vous... Quand on vous persécutera
dans une ville, fuyez dans une autre jusqu'à ce qu'arrive le Règne du Fils de
l'homme..." [2] Je les rappelle et
c'est le moment de les appliquer." 164> "Je ne les ai pas dites ainsi, et pas
celles-ci seulement" objecte
Jésus. "Oh ! pour le moment, il ne faut se rappeler que
celles-là, et les dire ainsi. Je sais ce que tu veux dire. Mais si la foi en
Toi ne s'est pas bien établie, et c'est une pierre dans ton Royaume, il ne
convient pas de se livrer aux ennemis. Ensuite... nous dirons et ferons le
reste..." L'expression de Judas est si brillante d'intelligence et
d'espièglerie qu'il conquiert tout le monde, sauf Jésus qui soupire. C'est
vraiment le séducteur auquel rien ne manque pour triompher des hommes. Jésus soupire et réfléchit... Mais il se rend, en remarquant
que la prévoyance de Judas n'est pas entièrement mauvaise. Judas expose
triomphalement tout son plan. "Nous irons donc demain et après-demain jusqu'au lendemain du sabbat, et nous resterons dans une cabane de branchages dans la vallée du Cédron, en parfaits Israélites. Eux se lasseront de t'attendre... et alors tu viendras. En attendant, tu resteras ici, tranquille, à te reposer. Tu es épuisé, mon Maître, et nous ne le voulons pas. Les portes closes, l'un de nous viendra te dire ce qu'ils font. Oh ! ce sera beau de les voir déçus !" |
|||
Tous sont d'accord, et Jésus n'oppose pas de résistance. Peut-être son extrême fatigue, peut-être le désir de réconforter Lazare, de lui donner tout le réconfort avant la lutte finale, le décident à céder. Peut-être aussi la nécessité réelle de se garder libre tant que ne sont pas accomplies toutes les œuvres qui sont nécessaires pour qu'Israël ne doute pas de sa Nature avant de le juger comme coupable... Il dit, ce qui est sûr : "Et qu'il en soit ainsi. Pourtant ne cherchez pas querelle, et évitez les mensonges. Taisez-vous plutôt, mais ne mentez pas. Allons maintenant, car Marthe nous appelle. Viens, Margziam. Je te trouve meilleure mine..." il s'éloigne tout en parlant, un bras autour des épaules du tout jeune disciple. |
|||