Vision du vendredi 22 juin 1945
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Pierre est vraiment solennel quand il entre en qualité de père
dans l'enceinte du Temple, tenant Yabeç par la main. Il semble même plus
grand, tant il se redresse en marchant.
Derrière, en groupe, tous les autres. Jésus est le dernier, occupé dans une
discussion serrée avec Jean d'En-Dor qui paraît avoir
honte d'entrer au Temple.
Pierre demande à son protégé : "Tu n'y es jamais venu ?"
et il lui répond : "Quand je suis né,
père, mais je ne m'en souviens pas" ce qui fait rire Pierre de bon cœur.
Il le répète à ses compagnons qui rient eux aussi en disant bonnement et
finement: "Peut-être tu dormais et par conséquent..." ou
bien : "Nous sommes tous comme toi. Nous ne nous rappelons pas
notre venue ici, à notre naissance."
197.2 -
Jésus aussi pose la même question à son protégé et en obtient
une réponse analogue ou presque, car Jean d'En-Dor dit : "Nous
étions des prosélytes et je suis venu dans les bras de ma mère justement pour
une Pâque, car je suis né dans les premiers jours d'Adar.
Ma mère, qui était de Judée, s'est mise en voyage dès qu'elle a pu, pour
offrir à temps son garçon au Seigneur. Peut-être trop vite... car elle est
tombée malade et ne s'en est pas remise. J'avais moins de deux ans, quand je
suis resté sans mère. Le premier malheur de ma vie. Mais j'étais l'aîné, et
restai fils unique à cause de sa maladie et elle était fière de mourir pour
avoir obéi à la Loi. Mon père me disait : "Elle est morte contente
de t'avoir offert au Temple"... Pauvre mère ! Qu'as-tu
offert ? Un futur assassin..."
"Jean, ne parle pas ainsi. Alors tu étais Félix, maintenant tu es Jean. Aie présente à ton esprit la grande grâce que Dieu t'a faite, cette
grâce, toujours. Mais laisse de côté la dégradation de ce que tu as été...
N'es-tu plus revenu au Temple ?"
"Oh ! si. À douze ans et depuis lors toujours tant que... tant que
je pus le faire... Après, quand j'aurais pu le faire, je ne l'ai plus fait,
car je t'ai dit quel culte j'avais : un seul, la Haine... Et même à
cause de cela, je n'ose pénétrer ici. Je me sens étranger dans la maison du
Père... Je l'ai abandonnée trop longtemps..."
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"Tu y reviens, pris par la main par Moi qui suis le Fils
du Père. Si je te conduis devant l'autel, c'est parce que je sais que tout
est pardonné."
Jean d'En-Dor sanglote douloureusement et dit : "Merci, mon Dieu."
"Oui, remercie le Très-Haut. Tu vois qu'elle avait l'esprit prophétique,
ta mère, véritable israélite ? Tu es le garçon consacré au Seigneur, et
qu'on ne rachète plus. Tu es à Moi, tu es à Dieu comme disciple et donc comme
futur prêtre de ton Seigneur, dans la nouvelle ère et la nouvelle religion
qui tirera son nom de Moi. Je t'absous de tout, Jean. Avance avec
sérénité vers le Saint. En vérité je te dis que parmi ceux qui habitent cette
enceinte, il y en a beaucoup qui sont bien plus coupables que toi et plus
indignes que toi de s'approcher de l'autel"...
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Pendant ce temps, Pierre s'ingénie à expliquer à l'enfant les
choses qui sont les plus remarquables dans le Temple, mais il appelle à son secours
les autres plus cultivés et spécialement Barthélemy et Simon parce qu'il se
trouve à l'aise avec les plus âgés, en qualité de père.
Ils sont près du trésor pour faire leur offrande quand Joseph
d'Arimathie les hèle :
"Vous êtes ici ? Depuis quand ?" dit-il après les
échanges de salutations.
"Depuis hier soir. "
"Le Maître ?"
"Il est là-bas avec un nouveau disciple. Il va venir."
Joseph regarde l'enfant et demande à Pierre: "Ton neveu ?"
"Non... oui... en somme rien comme sang, beaucoup comme foi, tout comme
amour."
"Je ne te comprends pas..."
"C'est un petit orphelin... donc pas de lien de sang. Un disciple...
donc beaucoup pour la foi. Un fils... donc tout comme amour. Le Maître l'a
recueilli... et moi, je le caresse. Il doit devenir majeur ces
jours-ci…"
"Déjà douze ans ? Si petit ?"
"Hé !... mais le Maître te le dira... Joseph tu es bon... un des
rares qui soient bons ici... Dis-moi: tu pourrais m'aider dans cette
affaire ? Tu sais... je le présente comme s'il
était mon fils. Mais je suis galiléen et j'ai une mauvaise lèpre..."
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"La lèpre !" s'exclame Joseph effrayé en s'écartant.
"N'aie pas peur !... J'ai la lèpre d'appartenir à Jésus ! La
plus odieuse pour ceux du Temple à part quelques exceptions."
"Non ! Ne le dis pas !"
"C'est la vérité et il faut la dire...
Aussi, je crains qu'ils ne soient cruels avec le petit à cause de moi et de
Jésus. Et puis je ne sais pas comment il sait la Loi, l'Halakha, l'Haggadah
et les Midrashim. Jésus dit qu'il en sait assez..."
"Hé ! mais si Jésus le dit, n'aie pas peur !"
"Mais pour me faire de la peine ceux-là..."
"Tu aimes bien ce petit ! Tu le gardes toujours avec toi?"
"Je ne peux pas !... Je suis toujours en marche... L'enfant est
petit et chétif..."
"Mais moi, je viendrais volontiers avec toi..." dit Yabeç que les
caresses de Joseph ont rassuré.
Pierre rayonne de joie... Mais il dit : "Le Maître dit que l'on ne
doit pas, et nous ne le ferons pas... Mais nous nous verrons tout de même...
Joseph... Tu m'aides ?"
"Mais oui ! Je viendrai avec toi. Devant moi, ils ne feront pas
d'injustices. Quand est-ce ?"
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Oh ! Maître ! Donne-moi ta bénédiction !"
"La paix à toi, Joseph. Je suis heureux de te voir, et en bonne
santé."
"Moi aussi, Maître, et même les amis te verront avec joie. Tu es à
Gethsémani ?"
"J'y étais. Après la prière, je vais à Béthanie."
"Chez Lazare ?"
"Non, chez Simon.
Il y a aussi ma Mère et la mère de mes frères et celle de Jean et Jacques.
Viendras-tu me trouver ?"
"Tu le demandes ? C'est pour moi une grande joie et un grand
honneur. Je te remercie. Je viendrai avec plusieurs amis..."
"Vas-y doucement, Joseph, avec les
amis !..." conseille Simon le Zélote.
"Oh ! vous les connaissez déjà. La prudence dit : "Que
l'air n'entende pas". Mais quand vous les verrez, vous comprendrez que
ce sont des amis."
"Alors..."
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"Maître, Simon de Jonas me parlait de la cérémonie du petit. Tu es venu
au moment où je demandais quand vous avez l'intention de la faire. Je veux y
être, moi aussi."
"Le mercredi avant la Pâque. Je veux qu'il fasse sa Pâque en fils de la Loi."
"Très bien. C'est entendu. Je viendrai vous prendre à Béthanie. Mais
lundi je viendrai avec des amis."
"C'est entendu."
"Maître, je te quitte. La paix soit avec Toi. C'est l'heure de
l'encens."
"Adieu, Joseph. La paix soit avec toi.
197.5 -
Viens, Yabeç. C'est l'heure la plus solennelle de la journée.
il y en a une autre du même genre le matin, mais celle-ci est encore plus
solennelle. Le matin c'est le commencement du jour. Et c'est bien que l'homme
bénisse le Seigneur pour en être béni pendant la journée, dans tous ses
travaux. Mais le soir c'est encore plus solennel. La lumière s'éloigne, le
travail cesse, la nuit arrive. La lumière qui s'éloigne nous rappelle la
chute dans le mal, et réellement les mauvaises actions arrivent d'ordinaire
pendant la nuit. Pourquoi ? Parce que l'homme n'est plus occupé par son
travail. Il lui arrive plus facilement d'être entouré par le Malin qui envoie
ses appels et ses cauchemars. Aussi c'est bien, après avoir remercié Dieu de
sa protection pendant la journée, de Le supplier qu'il éloigne de nous les
fantômes de la nuit et les tentations. La nuit, le sommeil... symbole de la
mort. Mais heureux ceux qui ayant vécu avec la bénédiction du Seigneur
s'endorment, non dans les ténèbres, mais dans une lumineuse aurore. Le prêtre
qui offre l'encens le fait au nom de nous tous. il prie pour tout le peuple,
en communion avec Dieu, et Dieu lui confie sa bénédiction pour le peuple de
ses fils. Vois-tu combien est grand le ministère du prêtre ?"
"Il me plairait... il me semblerait être encore plus près de
maman..."
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