424> 354.1 -
Avant la vision du 7 décembre a été placée celle de la seconde multiplication
des pains reçue le 28 mai 1944, avec la dictée qui s'y rapporte.
Vision du vendredi 7 décembre 1945
354.2 -
La plage de Capharnaüm
fourmille de gens qui sortent d'une vraie flottille de barques de toutes
tailles. Les premiers à débarquer partent dans la foule à la recherche du
Maître, d'un apôtre ou au moins d'un disciple. Ils interrogent les uns et les
autres....
Finalement, un homme répond :
«Le Maître ? Les apôtres ? Non. Ils sont partis dès la fin du
sabbat et ne sont pas rentrés. Mais ils vont revenir, car il y a des
disciples. J'ai parlé tout à l'heure avec l'un d'entre eux. Ce doit être un
grand disciple. Il parle comme Jaïre ! Il
est allé vers cette maison au milieu des champs, en suivant la mer.»
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425> L'homme qui a posé
la question en répand le bruit, et tous se précipitent vers l'endroit
indiqué. Mais après avoir fait environ deux cents mètres sur la rive, ils
rencontrent tout un groupe de disciples qui viennent vers Capharnaüm en
faisant de grands gestes. Ils les saluent et demandent :
«Où est le Maître ?»
Les disciples répondent :
«Pendant la nuit, après le miracle,
il est parti en barque de l'autre côté de la mer en compagnie de ses
disciples. Nous avons vu, au clair de lune, les voiles qui cinglaient vers Dalmanutha.
- Ah ! voilà! Nous le cherchions à Magdala
chez Marie, et il n'y était pas ! Pourtant... les pêcheurs de
Magdala auraient pu nous le dire !
-Ils ne l'auront pas su. Peut-être est-il allé sur les monts d'Arbel
pour prier. Il y est déjà passé une fois,
l'an dernier avant la Pâque. Je l'ai rencontré à ce moment-là, par une très
grande grâce du Seigneur à son pauvre serviteur, dit Étienne.
- Mais il ne revient pas ici ?
- Il va sûrement revenir. Il doit faire ses adieux et donner des ordres. Mais
que voulez-vous ?
- L'entendre encore, le suivre, devenir ses disciples.
- Il va maintenant à Jérusalem. Vous l'y retrouverez. Et là, dans la Maison
de Dieu, le Seigneur vous parlera, si pour vous il est utile de le suivre.
354.3 -
Car il est bon que vous sachiez que, s'il ne repousse personne, nous avons en
nous des tendances qui repoussent la Lumière. Certains en sont saturés — cela
ne serait qu'un moindre mal car lui, il est Lumière et si nous devenons
loyalement ses disciples avec une volonté bien décidée, sa lumière nous
pénètre et chasse nos ténèbres —. Mais s'ils y sont plongés et s'y attachent
comme à leur propre chair, alors il vaut mieux qu'ils s'abstiennent de venir,
à moins qu'ils ne se détruisent pour se recréer à neuf. Réfléchissez donc
pour savoir si vous avez en vous la force de prendre un nouvel esprit, une
nouvelle manière de penser, une nouvelle façon de vouloir. Priez pour pouvoir
connaître la vérité sur votre vocation. Puis venez, si vous croyez. Et veuille
le Très-Haut, qui a guidé Israël dans son "Passage",
vous guider, en ce "Pessah",
pour que vous marchiez à la suite de l'Agneau, hors des déserts, vers la
Terre éternelle, vers le Royaume de Dieu, dit Étienne au nom de tous ses
compagnons.
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426> - Non, non ! Tout de
suite ! Tout de suite ! Personne ne fait ce que lui fait. Nous voulons le
suivre» dit la foule en effervescence.
Étienne a un sourire où passent beaucoup d'expressions. Il ouvre les bras et
dit :
«C'est parce qu'il vous a donné en abondance du bon pain que vous voulez
venir ? Croyez-vous qu'à l'avenir il ne vous donnera que cela ?
Lui, il promet à ceux qui le suivent ce qui est son lot : la souffrance,
la persécution, le martyre. Ce ne sont pas des roses, mais des épines; pas
des caresses, mais des gifles, pas du pain, mais des pierres qui sont prêtes
pour les "christ". Et je parle ainsi sans blasphémer, parce que ses
vrais fidèles seront oints de l'huile sainte
faite de sa grâce et de sa souffrance, et nous serons "oints" pour
être victimes sur l'autel et rois au Ciel.
- Eh bien ? En serais-tu jaloux ? Tu en es, toi ? Nous voulons
en être nous aussi. Il est le Maître pour tous.
- C'est bien. Je vous le disais parce que je vous aime et que je veux que
vous sachiez ce que c'est qu'être ses "disciples" pour ne pas être
ensuite des déserteurs. Allons donc l'attendre tous ensemble à sa maison. Le
crépuscule commence et c'est le début du sabbat. Il viendra le passer ici
avant son départ.»
354.4 -
Ils se dirigent vers la ville en discutant. Plusieurs interrogent Étienne -
et Hermas qui
les a rejoints -, car, aux yeux des juifs, ils ont une lumière spéciale en
tant qu'élèves préférés de Gamaliel. Plusieurs
demandent : "Mais que dit Gamaliel de lui ?", d'autres :
"Est-ce lui qui vous a envoyés ?", et d'autres encore :
"N'a-t-il pas souffert de vous perdre ?", ou bien :
"Et le Maître, que dit-il du grand rabbi ?"
Les deux hommes répondent avec patience :
«Gamaliel parle de Jésus de Nazareth comme du plus grand homme d'Israël.
- Oh ! plus grand que Moïse ? demandent certains, presque scandalisés.
- Il dit que Moïse est l'un des nombreux précurseurs du Christ, mais qu'il
n'était que le serviteur du Christ.
- Alors, pour Gamaliel, celui-ci est le Christ? C'est ce qu'il dit? Si le
rabbi Gamaliel l'affirme, la question est tranchée. C'est lui le Christ !
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427> — Il ne dit pas
cela. Il n'arrive pas encore à le croire, pour son malheur. Mais il assure
que le Christ est sur la terre car il lui a parlé, il y a plusieurs années,
ainsi que le sage Hillel.
Et il attend le signe que le Christ lui a promis pour le reconnaître,
dit Hermas.
— Mais comment a-t-il fait pour croire que cet homme était le Christ? Que
faisait-il? Moi, je suis aussi âgé que Gamaliel, mais je n'ai jamais entendu
dire que ce que le Maître fait l'ait déjà été chez nous. S'il n'est pas
persuadé par ces miracles, qu'est-ce qu'il a donc vu de si surnaturel dans ce
Christ pour pouvoir croire en lui ?
— Il l'a vu oint par la Sagesse de Dieu. C'est ce qu'il affirme, répond
encore Hermas.
— Et alors qui est cet homme-ci pour Gamaliel ?
— Le plus grand homme, maître et précurseur d'Israël. S'il pouvait
dire : "C'est le Christ", l'âme sage et juste de mon premier
maître serait sauvée» dit Étienne.
Et il achève :
«Et je prie pour que cela arrive, à tout prix.
— Et s'il ne croit pas que c'est le Christ, pourquoi vous y a-t-il
envoyés ?
—Nous voulions y venir. Il nous a laissés faire en disant que c'était bien.
— Peut-être pour savoir et rapporter au Sanhédrin..., insinue
quelqu'un.
— Homme, que dis-tu là? Gamaliel est honnête. Il ne sert d'espion à personne
et surtout pas aux ennemis d'un innocent !»
Étienne se fâche et on dirait un archange, tant il est indigné, et presque
rayonnant dans sa sainte colère.
«Il aura été désolé de vous perdre, pourtant, dit un autre.
— Oui et non. Comme homme qui nous aimait bien, oui. Comme âme très droite,
non, parce qu'il a dit : "Il est plus grand et plus jeune que moi.
Je puis donc fermer les yeux, rassuré sur votre avenir, en sachant que vous
appartenez au Maître des maîtres".
— Et Jésus de Nazareth, que dit-il du grand rabbi ?
— Oh ! il n'a que des paroles élevées pour lui !
— Il n'en est pas jaloux ?
—Dieu ne jalouse pas», rétorque sévèrement Hermas. «Ne fais pas de
suppositions sacrilèges.
— Mais pour vous, alors, il est Dieu ? En êtes-vous certains ?»
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428> Les deux hommes
affirment d'une seule voix :
«Comme d'être vivants en ce moment.»
Et Étienne conclut :
«Et croyez-le vous aussi pour posséder la vraie vie.»
354.5 -
Les voilà de nouveau sur la plage devenue un lieu de réunion, et ils la
traversent pour aller à la maison. Sur le seuil se trouve Jésus, qui caresse
des enfants. Des disciples se groupent avec des curieux et ils
demandent :
«Maître, quand es-tu arrivé ?
— Il y a quelques instants.»
Le visage de Jésus a encore la majesté solennelle, un peu extatique, qu'il
prend après une prière prolongée.
«Tu as été en oraison, Maître ? demande Étienne à voix basse, par
respect, comme il s'est incliné pour le même motif.
— Oui. A quoi le vois-tu, mon fils ? demande Jésus en posant la main sur
ses cheveux foncés en une douce caresse.
—A ton visage d'ange. Je suis un pauvre homme, mais ton aspect est si limpide
que j'y lis les palpitations et les actions de ton âme.
- Le tien aussi est limpide. Tu es l'un de ceux qui restent tout petits...
— Et qu'y a-t-il sur mon visage, Seigneur ?
— Viens à part et je te le dirai.»
Il le saisit par le poignet et l'entraîne dans un couloir obscur.
«Charité, foi, pureté, générosité, sagesse; or tout cela, c'est Dieu qui te
l'a donné, tu l'as cultivé, et tu l'approfondiras. Enfin, d'après ton nom, tu
as la couronne d'or pur et avec un grand joyau qui resplendit sur ton front.
Sur l'or et les pierres sont gravés deux mots :
"Prédestination" et "Prémices". Sois digne de ton sort, Etienne.
Va en paix avec ma bénédiction.»
Et il pose de nouveau la main sur ses cheveux tandis qu'Étienne s'agenouille
pour ensuite se prosterner et lui baiser les pieds.
354.6 -
Ils reviennent vers les autres.
«Ces gens sont venus pour t'entendre, dit Philippe.
— On ne peut pas parler ici. Allons à la synagogue. Jaïre en sera heureux.»
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429> Jésus en tête, suivi
par le cortège des autres, se rend donc à la belle synagogue de Capharnaüm;
salué par Jaïre, il y entre et ordonne que toutes les portes restent ouvertes
pour que ceux qui n'arrivent pas à pénétrer puissent l'entendre de la rue et
de la place voisines.
Jésus va à sa place, dans cette synagogue amie. Cette fois, heureusement, les
pharisiens sont absents : peut-être sont-ils déjà partis en grande pompe
pour Jérusalem. Et il commence à parler.
«En vérité, je vous dis : vous me cherchez non pas pour m'entendre ni
pour les miracles que vous avez vus, mais pour ce pain que je vous ai donné à
manger à satiété et sans frais. Les trois quarts d'entre vous me cherchaient
pour cette raison, et par curiosité, venant de toutes parts de notre patrie.
Il manque donc à votre recherche l'esprit surnaturel; et l'esprit humain
reste dominant, avec ses curiosités malsaines ou pour le moins ses
imperfections infantiles, une curiosité non pas simple comme celle des petits
enfants, mais diminuée comme l'intelligence d'un esprit obtus. Et à la
curiosité, s'allie la sensualité et un sentiment vicié. La sensualité,
subtile comme le démon dont elle est la fille, se cache derrière des
apparences et des actes qui semblent bons; le sentiment vicié, simple
déviation morbide du sentiment, ressent, comme tout ce qui est
"maladie", le besoin et le désir des drogues et non de la simple
nourriture : le bon pain, l'eau limpide, l'huile pure, le lait frais,
suffisant pour vivre, et bien vivre. Le sentiment vicié veut des sensations
extraordinaires pour être remué et éprouver le frisson du plaisir, ce frisson
maladif des paralysés qui ont besoin de se droguer pour goûter l'illusion
d'être intègres et virils. La sensualité veut satisfaire sans fatigue sa
gourmandise, dans ce cas, avec du pain qui n'a pas coûté de sueurs, puisque
Dieu l'a donné par bonté.
354.7 -
Les dons de Dieu ne sont pas l'ordinaire, ils sont l'exceptionnel. On ne peut
y prétendre, ni se livrer à la paresse en disant : "Dieu me les
donnera." Il est écrit : "Tu mangeras ton pain baigné par la
sueur de ton front",
c'est-à-dire le pain gagné par le travail. Si celui qui est Miséricorde a
dit : "J'ai pitié de ces foules qui me suivent depuis trois jours,
n'ont plus rien à manger et pourraient défaillir en route avant d'avoir
atteint Hippos
sur le lac, ou Gamla,
ou d'autres villes", et s'il a pourvu à leurs besoins, cela ne signifie
pas pour autant qu'on doive le suivre pour cette raison. C'est pour bien
davantage qu'un peu de pain, destiné à devenir ordure après la digestion, que
l'on doit me suivre.
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430> Ce n'est pas pour la
nourriture qui remplit le ventre, mais pour celle qui nourrit l'âme, car vous
n'êtes pas seulement des animaux occupés à brouter, ruminer, ou fouiller avec
leur groin et s'engraisser. Mais vous êtes des âmes ! C'est cela que vous êtes
! La chair, c'est le vêtement, l'être c'est l'âme, et elle seule est
immortelle. La chair, comme tout vêtement, s'use et finit en poussière: elle
ne mérite pas qu'on s'en occupe comme si c'était une perfection à laquelle il
faut accorder tous ses soins.
Cherchez donc ce qu'il est juste de se procurer, non ce qui est superflu.
Cherchez à vous procurer non la nourriture périssable, mais celle qui dure
pour la vie éternelle. Celle-là, le Fils de l'homme vous la donnera toujours,
quand vous la voudrez. Car le Fils de l'homme dispose de tout ce qui vient de
Dieu et il peut vous le donner; car il est Maître — et le Maître magnanime —
des trésors du Père qui a imprimé sur lui son sceau pour que les yeux
honnêtes ne soient pas confondus. Et si vous avez en vous la nourriture
éternelle, vous pourrez accomplir les œuvres de Dieu, puisque vous serez
nourris de Dieu lui-même.
354.8 -
— Que devons-nous faire pour accomplir les œuvres de Dieu? Nous observons la
Loi et les prophètes. Nous sommes donc déjà nourris de Dieu et nous
accomplissons les œuvres de Dieu.
— C'est vrai. Vous observez la Loi, ou plutôt vous "connaissez" la Loi. Mais connaître n'est pas pratiquer. Nous
connaissons, par exemple, les lois de Rome et pourtant un juif fidèle ne les
pratique pas autrement que dans les formules qui lui sont imposées par sa
condition de sujet. Pour le reste, nous ne pratiquons pas — je parle des
juifs fidèles — les usages païens des Romains bien que nous les connaissions.
La Loi et les prophètes que vous tous connaissez devraient en effet vous
nourrir de Dieu et vous donner par conséquent la capacité d'accomplir les
œuvres de Dieu. Mais pour cela, ils devraient ne faire qu'un avec vous, comme
l'air que vous respirez et la nourriture que vous assimilez, qui se changent
tous deux en vie et en sang. Au contraire, ils restent étrangers, tout en
étant dans votre maison, comme peut l'être un objet que vous appréciez et
utilisez souvent, mais qui ne vous ôterait pas la vie s'il venait à manquer.
Alors que... Ah ! Essayez un peu de ne pas respirer pendant quelques minutes,
essayez de rester sans nourriture pendant des jours et des jours... et vous
verrez que vous ne pouvez pas vivre. C'est ce que devrait ressentir votre moi
à cause de sa dénutrition et de son asphyxie de la Loi et des prophètes,
puisque vous les connaissez, mais ne les assimilez pas, et qu'ils ne font pas
qu'un avec vous.
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431> C'est cela que je
suis venu enseigner et donner: le suc, l'air de la Loi et des prophètes, pour
rendre sang et respiration à vos âmes qui meurent de faim et d'asphyxie. Vous
ressemblez à des enfants qu'une maladie rend incapables de savoir ce qui peut
les nourrir. Vous avez des provisions, mais vous ne savez pas qu'elles
doivent être mangées pour se changer en principe vital, et qu'elles
deviennent vraiment nôtres, par une
fidélité pure et généreuse à la Loi du Seigneur, qui a parlé à Moïse et aux
prophètes pour vous tous. C'est donc un devoir de venir à moi pour avoir
l'air et le suc de la vie éternelle. Mais ce devoir présuppose en vous une
foi. Car si quelqu'un n'a pas la foi, il ne peut croire à mes paroles, et
s'il ne croit pas, il ne vient pas me dire : "Donne-moi le pain
véritable." Et s'il n'a pas le pain véritable, il ne peut accomplir les
œuvres de Dieu puisque cette capacité lui manque. Par conséquent, pour être
nourris de Dieu et pour accomplir ses œuvres, il est nécessaire que vous
fassiez cette démarche fondamentale : croire en Celui que Dieu a envoyé.
354.9 -
—Mais quels miracles fais-tu donc pour qu'il nous soit possible de croire en
toi comme en un envoyé de Dieu et pour qu'on puisse voir sur toi le sceau de
Dieu ? Que fais-tu que les prophètes n'aient déjà fait, certes sous une
forme plus modeste ? Moïse t'a même surpassé, puisque ce n'est pas une
seule fois, mais pendant quarante ans qu'il a nourri nos pères d'une
nourriture merveilleuse. Il est écrit que, pendant quarante années, nos pères
ont mangé la manne du désert
et il est dit par conséquent que Moïse leur donna à manger du pain venu du
Ciel : lui, il le pouvait.
— Vous êtes dans l'erreur. Ce n'est pas Moïse, mais le Seigneur qui a pu
faire cela. Et dans l'Exode on lit : "Voici : je ferai
pleuvoir du pain du ciel. Que le peuple sorte et recueille ce qui lui suffit
pour chaque jour; ainsi je me rendrai compte si le peuple marche selon ma Loi.
Et le sixième jour, qu'il en ramasse le double par respect pour le septième
jour, le sabbat."
Et les Hébreux virent le désert se recouvrir chaque matin de "quelque
chose de minuscule qui ressemble à ce qui est pilé dans le mortier, et au
grésil, semblable à la graine de coriandre, et au bon goût de fleur de farine
mélangée à du miel."
Ce n'est donc pas Moïse, mais le Seigneur qui a procuré la manne.
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432> C'est Dieu qui peut tout. Tout. Punir et bénir,
enlever et accorder. Et moi, je vous assure qu'entre les deux, il préfère
bénir et accorder plutôt que punir et enlever.
Moïse, comme il est dit dans l'Ecclésiastique, était "cher à Dieu et aux
hommes, sa mémoire était bénie,
car il était rendu par Dieu semblable aux saints dans leur gloire, grand et
terrible pour les ennemis,
capable de susciter des prodiges et d'y mettre fin, glorieux en présence des
rois, son ministre en présence du peuple. Il avait vu la gloire de Dieu
et entendu la voix du Très-Haut, il était le gardien des préceptes et de la
Loi de vie et de sagesse."
C'est pourquoi Dieu, comme le dit la Sagesse, par amour pour Moïse, a nourri
son peuple du pain des anges, et lui a envoyé du ciel un pain déjà fait, sans
fatigue, un pain délicieux et d'une douce saveur. Et — souvenez-vous bien de
ce que dit la Sagesse — puisqu'il venait du ciel,
et qu'il montrait la douceur de Dieu envers ses fils, il avait pour chacun le
goût que celui-ci désirait, et procurait à chacun les effets qu'il voulait,
étant utile aussi bien au bébé, à l'estomac encore imparfait, ou à l'adulte à
l'appétit et à la digestion vigoureux, à la fillette délicate ou au vieillard
décrépit.
Et même, pour montrer que ce n'était pas œuvre d'homme, il renversa les lois
des éléments car ce pain mystérieux qui, au lever du soleil, fondait comme du
givre résistait au feu. Ou plutôt : le feu — c'est toujours la Sagesse qui
parle — oublia sa propre nature
par respect pour l'œuvre de Dieu son Créateur et pour les besoins des justes
de Dieu. Ainsi, alors qu'il a l'habitude de s'enflammer pour tourmenter, ici
il se fit doux pour faire du bien à ceux qui faisaient confiance au Seigneur.
C'est donc pour cela qu'en se transformant de toutes manières, il servit à la
grâce du Seigneur, leur nourrice à tous, selon les besoins de celui qui
priait le Père éternel,
pour que ses enfants bien-aimés apprennent que ce n'est pas la reproduction
des fruits qui nourrit les hommes, mais que c'est la parole du Seigneur qui
conserve ceux qui croient en Dieu.
En effet, le feu ne consumait pas - comme il le pouvait - la douce manne, pas
même si la flamme était haute et puissante, alors que le doux soleil du matin
suffisait à la faire fondre,
afin que les hommes apprennent et se rappellent que les dons de Dieu doivent être
recherchés dès le commencement du jour et de la vie, et que, pour les
obtenir, il faut devancer la lumière et se lever pour louer l'Eternel dès la
première heure du matin.
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433> C'est cela que la
manne enseignait aux Hébreux. Et moi, je vous le rappelle, car c'est un
devoir qui dure et durera jusqu'à la fin des siècles. Cherchez le Seigneur et
ses dons célestes, sans paresser jusqu'aux heures tardives du jour ou de la
vie. Levez-vous pour le louer avant même que le soleil levant ne le fasse, et
nourrissez-vous de sa parole qui consacre, préserve et conduit à la vie
véritable.
Ce n'est pas Moïse qui vous a donné le pain du ciel mais, en vérité, c'est
Dieu le Père, et maintenant, en vérité, c'est mon Père qui vous donne le Pain
véritable, le Pain nouveau, le Pain
éternel qui descend du ciel, le Pain de miséricorde, le Pain de vie, le Pain
qui donne la vie au monde, le Pain qui rassasie toute faim et libère de toute
faiblesse, le Pain qui donne à celui qui le prend la vie éternelle et l'éternelle
joie.
354.10 -
-Seigneur, donne-nous de ce pain et nous ne mourrons plus.
- Vous mourrez comme tout homme, mais vous ressusciterez pour la vie
éternelle si vous vous nourrissez saintement
de ce Pain, parce qu'il rend incorruptible celui qui le mange. Pour ce qui
est de vous, il sera donné à ceux qui le demandent à mon Père avec un cœur
pur, une intention droite et une sainte charité. C'est pour cela que je vous
ai appris à dire : "Donne-nous notre pain quotidien." Mais
pour ceux qui s'en nourriront indignement, il deviendra un grouillement de
vers d'enfer, comme les paniers de manne conservés contre l'ordre reçu. Et ce
Pain de salut et de vie deviendra, pour eux, mort et condamnation. Car le
plus grand sacrilège sera commis par ceux qui mettront ce Pain sur une table
spirituelle corrompue et fétide, et le profaneront en le mêlant à la sentine
de leurs inguérissables passions.
Mieux vaudrait pour eux ne l'avoir jamais pris !
354.11 -
Mais où est ce Pain ? Comment le trouve-t-on ? Quel nom
a-t-il ?
- Moi, je suis le Pain de vie. C'est en moi qu'on le trouve. Son nom est
Jésus. Qui vient à moi n'aura plus jamais faim, et qui croit en moi n'aura
plus jamais soif, car les fleuves célestes se déverseront en lui, éteignant
toute ardeur matérielle. Je vous l'ai dit, désormais. Vous me connaissez à
présent, et pourtant vous ne croyez pas. Vous ne pouvez croire que tout est
en moi. Et pourtant, c'est ainsi. C'est en moi que se trouvent tous les
trésors de Dieu. C'est à moi qu'est donné tout ce qui appartient à la terre,
de sorte que les Cieux glorieux et la terre militante sont réunis en moi.
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434> Même, elle est en
moi, la foule de ceux qui sont morts dans la grâce de Dieu et attendent en
souffrant, car tout pouvoir est en moi et pour moi. Et je vous le dis: tout
ce que le Père me donne viendra à moi. Et je ne chasserai pas celui qui vient
à moi car je suis descendu du Ciel pour faire non pas ma volonté, mais la
volonté de celui qui m'a envoyé. Or voici la volonté de mon Père, du Père qui
m'a envoyé : que je ne perde aucun de ceux qu'il m'a donnés, mais que je les
ressuscite au dernier jour. La volonté du Père qui m'a envoyé est que
quiconque connaît le Fils et croit en lui ait la vie éternelle et que je
puisse le ressusciter au Dernier Jour, en le voyant nourri de la foi en moi
et marqué de mon sceau.»
354.12 -
Ce discours nouveau et hardi du Maître suscite tout un bourdonnement dans la
synagogue et au-dehors. Et lui, après avoir repris haleine un instant, tourne
ses yeux étincelants de ravissement là où l'on murmure davantage - or ce sont
précisément les groupes où il y a des juifs. Il reprend :
«Pourquoi marmonner entre vous ? Oui, je suis le fils de Marie de
Nazareth, fille de Joachim de la race de David,
vierge consacrée au Temple, puis épousée par Joseph, fils de Jacob, de la
race de David. Beaucoup d'entre vous ont connu les justes qui donnèrent la
vie à Joseph, menuisier de race royale, et à Marie, vierge héritière de
souche royale. Cela vous fait dire : "Comment celui-ci peut-il se dire
descendu du Ciel ?" et le doute naît en vous.
Je vous rappelle ce qu'annoncent les prophètes sur l'incarnation du Verbe.
Et je vous rappelle comment, plus pour nous israélites que pour tout autre
peuple, nous croyons que Celui que nous n'osons pas nommer ne peut pas se
donner une chair selon les lois humaines, qui plus est selon les lois d'une
humanité déchue. Si le Très Pur, l'Incréé, s'est humilié jusqu'à se faire
homme par amour pour l'homme, il ne pouvait choisir qu'un sein de Vierge plus
pur que les lys pour revêtir de chair sa divinité.
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435> Le Pain descendu du
ciel au temps de Moïse a été placé dans l'arche d'or,
recouverte du propitiatoire,
veillée par les chérubins, derrière les voiles du Tabernacle. Et avec le Pain
était la Parole de Dieu.
Et il était juste qu'il en fût ainsi, parce que les dons de Dieu et les
tables de sa très sainte Parole doivent être traités avec le plus grand
respect. Mais alors qu'est-ce que Dieu aura préparé pour sa propre Parole et
pour le Pain véritable descendu du Ciel ? Une arche plus inviolée et
plus précieuse que l'arche d'or, couverte du précieux propitiatoire de sa
pure volonté d'immolation, veillée par les chérubins de Dieu, voilée d'une
candeur virginale, d'une parfaite humilité, d'une sublime charité et de
toutes les vertus les plus saintes.
Alors ? Ne comprenez-vous pas encore que ma paternité est au Ciel et
donc que c'est de là que je viens ? Oui, je suis descendu du Ciel pour
accomplir le décret de mon Père, le décret de salut des hommes selon ce qui a
été promis au moment même de la condamnation et répété aux patriarches et aux
prophètes.
Mais cela, c'est la foi. Or la foi est donnée par Dieu à ceux qui ont une âme
de bonne volonté. Aussi personne ne peut venir à moi s'il n'est pas conduit à
moi par mon Père, qui le voit dans les ténèbres, mais avec un vrai désir de
la lumière. Il est écrit dans les Prophètes : "Ils seront tous instruits
par Dieu."
Voilà, c'est dit. C'est Dieu qui leur
apprend où ils doivent aller pour être instruits par Dieu. Donc tout
homme qui, au fond de son âme droite, a entendu Dieu parler, a appris de mon
Père à venir vers moi.
—Et qui veux-tu qui ait entendu Dieu, ou vu sa Face?» demandent plusieurs qui
commencent à montrer des signes d'irritation et de scandale. Et ils finissent
par dire :
«Tu délires ou tu es un illuminé.
— Personne n'a vu Dieu, excepté celui qui est de Dieu. Celui-là a vu le Père
et c'est moi.
354.13 -
Et maintenant écoutez le "Credo" de la vie future sans lequel on ne
peut se sauver.
En vérité, en vérité je vous dis que
celui qui croit en moi a la vie éternelle. En vérité, en vérité je vous dis
que je suis le Pain de la vie éternelle.
Dans le désert, vos pères ont mangé la manne et ils sont morts, car la manne
était une nourriture sainte mais temporelle, et elle
donnait la vie pour autant qu'il était
nécessaire d'arriver à la Terre, promise par Dieu à son peuple.
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436> Mais la Manne que je
suis n'aura pas de limites de temps ni de puissance. Non seulement elle est
céleste, mais elle est divine, et elle produit ce qui est divin :
l'incorruptibilité, l'immortalité de ce que Dieu a créé à son image et à sa
ressemblance. Elle ne durera pas quarante jours, quarante mois, quarante ans,
quarante siècles. Mais elle durera aussi longtemps que le temps, et elle sera
donnée à tous ceux qui ont pour elle une faim sainte et agréable au Seigneur,
qui se réjouira de se donner sans mesure aux hommes pour lesquels il s'est
incarné afin qu'ils aient la Vie qui ne meurt pas.
Moi, je peux me donner, je peux me transsubstantier par amour pour les
hommes, de sorte que le pain devienne Chair et que la Chair devienne pain,
pour la faim spirituelle des hommes qui, sans cette nourriture, mourraient de
faim et de maladies spirituelles. Mais si quelqu'un mange de ce Pain avec
justice, il vivra éternellement. Le Pain que je donnerai, ce sera ma Chair
immolée pour la vie du monde; ce sera mon amour répandu dans les maisons de
Dieu pour que viennent à la table du Seigneur ceux qui sont aimants ou
malheureux et qu'ils trouvent un réconfort pour leur besoin de se fondre en
Dieu et un soulagement pour leurs peines.
354.14 -Mais
comment peux-tu nous donner ta chair à manger ? Pour qui nous
prends-tu ? Pour des fauves sanguinaires ? Pour des sauvages ?
Pour des homicides ? Le sang et le crime nous répugnent.
- En vérité, en vérité je vous dis que bien des fois l'homme est pire qu'un
fauve et que le péché rend plus que sauvage, que l'orgueil donne une soif
homicide, et que ce n'est pas à tous ceux qui sont ici présents que
répugneront le sang et le crime. A l'avenir aussi, l'homme restera le même
parce que Satan, la sensualité et l'orgueil en font une bête féroce. Et c'est
pour satisfaire un besoin plus grand que jamais que vous devez et que l'homme
devra se guérir lui-même des germes terribles par l'infusion du Saint. En vérité, en vérité je vous dis que si
vous ne mangez pas la chair du Fils de l'homme et si vous ne buvez pas son
sang, vous n'aurez pas en vous la Vie. Celui qui mange dignement ma chair
et qui boit mon sang possède la vie éternelle et je le ressusciterai au
Dernier Jour. Car ma chair est vraiment une nourriture et mon sang un
breuvage. Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang demeure en moi et moi
en lui.
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437> Comme le Père vivant
m'a envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me mange vivra par
moi et ira là où je l'envoie. Il fera ce que je veux, il vivra avec austérité
comme homme, il sera ardent comme un séraphin et il sera saint, car pour
pouvoir se nourrir de ma chair et de mon sang, il s'interdira les fautes et
il vivra en s'élevant pour finir son ascension aux pieds de l'Eternel.
— Mais cet homme est fou! Qui peut vivre de cette façon ? Dans notre
religion, il n'y a que le prêtre qui doive se purifier pour offrir la
victime. Lui, ici, il veut faire de nous autant de victimes de sa folie.
Cette doctrine est trop pénible et ce langage trop dur ! Qui peut l'écouter
et le pratiquer ?» murmure-t-on dans l'assistance, dont plusieurs sont
des disciples réputés tels.
354.15 -
Les gens se dispersent en commentant, et les rangs des disciples paraissent
très réduits quand le Maître et les plus fidèles restent seuls dans la
synagogue. Je ne les compte pas, mais je pense qu'on arrive à peu près à une
centaine. Il doit donc y avoir eu une forte défection même dans les rangs des
anciens disciples depuis longtemps au service de Dieu.
Parmi ceux qui sont restés, il y a les apôtres, le prêtre Jean et le scribe Jean, Étienne, Hermas, Timon, Hermastée, Agape, Joseph, Salomon, Abel de
Bethléem de Galilée, et Abel
l'ancien lépreux de Chorazeïn avec son ami Samuel, Élie
(celui qui renonça à ensevelir son père pour suivre Jésus), Philippe d'Arbel,
Aser et Ismaël de Nazareth, ainsi que d'autres dont je ne connais pas le nom.
Tous ceux-là parlent doucement en commentant la défection des autres et les
paroles de Jésus, qui reste pensif, les bras croisés, appuyé à un haut
pupitre.
«Vous êtes scandalisés par mes paroles ? Et si je vous disais que vous
verrez un jour le Fils de l'homme monter au Ciel, où il était auparavant, et
s'asseoir à côté du Père? Et qu'avez-vous compris, assimilé, cru, jusqu'à
présent? Et avec quoi avez-vous écouté et saisi? Seulement avec ce qui est
tout humain? C'est l'esprit qui vivifie
et a de la valeur. La chair n'a rien à y voir. Mes paroles sont esprit et
vie, et c'est spirituellement qu'il faut les écouter et les comprendre pour y
puiser la vie. Mais il y en a beaucoup parmi vous dont l'esprit est mort
parce qu'il est sans foi. Beaucoup d'entre vous ne croient pas vraiment, et
c'est inutilement qu'ils restent près de moi. Ils n'y trouveront pas la Vie,
mais la Mort. Car ils restent, comme je l'ai déjà dit, par curiosité ou par
affection humaine, ou pire, dans une intention encore plus indigne. Ils n'ont
pas été amenés ici par le Père en récompense de leur bonne volonté, mais par
Satan.
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438> Personne, en vérité,
ne peut venir à moi, si cela ne lui est pas accordé par mon Père. Partez vous
aussi, vous qui restez difficilement parce que vous avez honte, humainement,
de m'abandonner, mais qui avez encore plus honte de rester au service d'un
homme qui vous semble " fou et dur ". Partez. Il vaut mieux que
vous soyez loin pour nuire. »
Plusieurs autres disciples se retirent alors, parmi lesquels le scribe Jean
et Marc, le
Gérasénien possédé, guéri par Jésus qui envoya
les démons dans les porcs. Les bons disciples se consultent et courent
derrière ceux qui ont abandonné, en essayant de les arrêter.
354.16 -
Il reste maintenant dans la synagogue Jésus, le chef de la synagogue, et les
apôtres...
Jésus se tourne vers les Douze, désolés, regroupés dans un coin: «Voulez-vous
vous en aller, vous aussi? »
Il dit cela sans amertume, sans tristesse, mais avec beaucoup de sérieux.
Dans un élan douloureux, Pierre lui dit :
«Seigneur, où veux-tu que nous allions? Vers qui? Tu es notre vie et notre
amour. Toi seul as les paroles de vie éternelle. Nous savons que tu es le
Christ, le Fils de Dieu. Si tu veux, chasse-nous. Mais, pour notre part, nous
ne te quitterons pas, pas même... pas même si tu ne nous aimais plus... »
Pierre pleure sans bruit, avec de grosses larmes... André aussi, Jean et les
deux fils d'Alphée pleurent ouvertement; les autres, pâles ou rouges par
suite de l'émotion, ne pleurent pas, mais souffrent visiblement.
«Pourquoi devrais-je vous chasser? N'est-ce pas moi qui vous ai choisis, tous
les douze?»
Prudemment, Jaïre
s'est retiré pour laisser Jésus libre de réconforter ou de réprimander ses
apôtres. Jésus, qui remarque sa retraite silencieuse, s'assied d'un air
accablé, comme si la révélation qu'il fait lui coûtait un effort supérieur à
ses moyens, épuisé comme il l'est, dégoûté, endolori. Puis il dit :
«Et pourtant, l'un de vous est un démon.»
La parole tombe lentement, effrayante, dans la synagogue où il n'y a que la
lumière des nombreuses lampes qui soit joyeuse... et personne n'ose rien
dire.
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439> Mais ils se regardent
les uns les autres avec un frisson de peur, en se posant une question
angoissée et, par une réponse encore plus angoissée et intime, chacun
s'examine lui-même...
Personne ne bouge pendant un moment. Jésus reste seul sur son siège, les
mains croisées sur les genoux, la tête basse. Il la relève enfin et
dit :
«Venez. Je ne suis tout de même pas un lépreux ! Ou bien me croyez-vous
tel ?»
Alors Jean s'avance rapidement et lui passe les bras autour du cou en
disant :
«Dans ce cas, j'ai la lèpre avec toi, mon seul amour. Avec toi dans la
condamnation. Avec toi dans la mort, si tu crois que c'est cela qui
t'attend...»
Et Pierre rampe à ses pieds, il les lui prend et les pose sur ses épaules en
sanglotant ::
«Presse-moi, foule-moi aux pieds ! Mais ne me laisse pas penser que tu te
méfies de ton Simon.»
Voyant que Jésus caresse les deux premiers, les autres s'avancent et lui
donnent des baisers sur ses vêtements, sur ses mains, sur ses cheveux... Seul
Judas ose lui embrasser le visage.
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